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Page:Revue des Deux Mondes - 1873 - tome 103.djvu/211

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SURSUM CORDA

Si tous les astres, ô nature,
Trompant la main qui les conduit,
S’entre-choquaient par aventure
Pour se dissoudre dans la nuit ;

Ou, comme une flotte qui sombre,
Si ces foyers, grands et petits,
Lentement dévorés par l’ombre,
Y disparaissaient engloutis,

Tu pourrais repeupler l’abîme
Et rallumer un firmament
Plus riche encore et plus sublime
Avec la terre seulement !

Car il te suffirait, pour rendre
À l’infini tous ses flambeaux,
D’y secouer l’humaine cendre
Qui sommeille au fond des tombeaux,

La cendre des cœurs innombrables,
Enfouis, mais brûlans toujours,
Où demeurent inaltérables.
Dans la mort, d’immortels amours.

Sous la terre, dont les entrailles
Absorbent les cœurs trépassés,
En six mille ans de funérailles
Quels trésors de flamme amassés !

Combien dans l’ombre sépulcrale
Dorment d’invisibles rayons !
Quelle semence sidérale
Dans la poudre des passions !