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Page:Revue des Deux Mondes - 1873 - tome 103.djvu/656

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maître habitait avec tous les siens. Souvent une rue entière était occupée par la même famille. Les luttes civiles qui se renouvelaient presque chaque année exigeaient ce groupement. Il y a encore à Florence la place des Peruzzi, la rue des Tornabuoni, des Albizzi, des Greci, des Bardi, des Cerchi. Ces anciens palais, toujours debout, donnent à l’architecture civils de Florence un cachet spécial que l’étranger n’oublie pas. Ils sont bâtis de pierres massives, taillées rudement, en bossages, surtout aux fondations où quelques-uns des blocs sont énormes. Les murailles sont épaisses comme celles d’une forteresse. La porte s’élève souvent au-dessus du niveau de la rue ; on y monte par des escaliers. Les fenêtres sont peu nombreuses, assez étroites, dessinées en voûte, disposées sur deux ou trois étages au plus. Le long de la façade principale sont des anneaux de fer à diverses hauteurs, élégamment ciselés. Les jours de fête, on y mettait les bannières, les torches. Aux angles sont parfois des ornemens en bronze ou des lanternes en fer forgé, dont quelques-unes sont un chef-d’œuvre d’art, comme les lanternes du palais Strozzi. Dans certains palais, on voit aussi sur les façades les crochets de fer qui servaient à suspendre la laine au moyen de bâtons transversaux. Loin de rougir de leur métier, les marchands florentins le tenaient en honneur ; c’était une gloire d’appartenir à l’art de la laine.

Ces palais, dont quelques-uns ont soutenu des sièges et portent la trace de l’incendie, comme ceux des Bardi, des Albizzi, sont pour la plupart des types d’architecture, surtout les plus modernes. Ils ont gardé de l’ordre étrusque primitif le lourd et robuste appareil en pierre de taille. L’art des constructions à Florence comme à Venise revêt un cachet original, mais, tandis que Venise, ville presque orientale, emprunte ses inspirations aux Arabes et aux Byzantins, Florence reste fidèle à l’ancien type toscan. Les palais Strozzi, Medici, Antinori, Rucellai, Pazzieu Quaratesi, ont été visités par tous les voyageurs. Les palais Spini, Mozzi, Buondelmonti, Davanzati, Bardi, Caponi, Albizzi, Alessandri, de dates plus anciennes, méritent également d’être cités. On connaît le palais Pitti, qui a servi de résidence aux Médicis, devenus princes de Toscane, plus tard aux grands-ducs de la maison de Lorraine, et qui appartient encore à la couronne.

Indépendamment de leur palazzo et de leur loge, les plus grandes familles avaient ce qu’elles nommaient leur tour, signe d’antique noblesse. C’étaient de véritables tours en pierre, dont quelques-unes sont hautes encore de 25 à 30 mètres, mais qui avaient le double de hauteur quand elles étaient intactes. Telles furent les premières habitations de Florence, empruntées sans doute aux