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habituel de l’une des trois langues principales, — l’anglais, Tallemand et le français, — la connaissance de ces langues assez répandue dans les classes instruites.

A la lumière d’une statistique raisonnée, il est facile de préjuger que c’est l’Angleterre et l’Italie qui se trouvent à cette heure dans les conditions les plus favorables pour produire des savans progressifs. On peut déjà constater chez ces deux peuples un mouvement qui commence à s’accentuer. Quant à l’Allemagne et à la France, qui réunissent tant d’élémens féconds, elles ont chacune à vaincre les deux plus grands obstacles qui s’opposent au progrès scientifique, l’Allemagne le militarisme, et la France l’ultramontanisme.

Le livre de M. de Candolle renferme encore plusieurs études afférentes à l’histoire de la science et des savans : des réflexions sur l’esprit d’observation et d’enseignement dans les écoles, — l’avantage pour la science d’une langue dominante et la part d’influence de l’hérédité, — la variabilité et la sélection dans le développement de l’espèce humaine. Appliquant à l’homme les principes que Wallace et Darwin ont introduits dans les sciences naturelles, il montre quelle sera l’influence de la sélection sur les nations, les classes et les individus, en prouvant par les exemples de l’histoire comment cette force agit chez les sauvages, les barbares et les peuples civilisés. Ce chapitre du livre fait connaître les lois qui président à l’évolution des races et des nations comme à celle des êtres organisés. C’est un chapitre de physique sociale que personne ne lira sans profit ; il démontre la profonde ignorance de ceux qui condamnent, sans les connaître ou sans les comprendre, les nouvelles idées nées dans la libre Angleterre et appelées à transformer un jour les sciences naturelles. Il ne manque à ces idées que la consécration du temps, qui marche, et de l’expérience, qui se fait en dépit de toutes les résistances aveugles ou intéressées. Enfin les philosophes et les législateurs méditeront les réflexions de l’auteur sur l’antagonisme apparent de la statistique et du libre arbitre, et les physiologistes un résumé des idées actuelles sur les transformations du mouvement dans les êtres organisés.


CH. MARTINS.



L’ÉVÊQUE BERKELEY.


The Works of G. Berkeley… (Œuvres de George Berkeley, évéque de Cloyne, contenant plusieurs de ses écrits inédits jusqu’à ce jour, avec la vie et la correspondance de l’auteur et un exposé de sa philosophie), par M. Alex. Campbell Fraser. Oxford 1871 ; 4 vol. in-8o.


La publication du Berkeley de M. Fraser mérite de ne point passer inaperçue, car notre situation philosophique prête à une comparaison instructive avec l’état des esprits au début du XVIIIe siècle. Aujourd’hui comme il y a cent cinquante ans, tous les efforts de la pensée philosophique paraissent se concentrer sur un point unique, la distinction du