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annales d’Hermann, abbé d’Altaha, et leur continuation, n’aient pas cru pouvoir insérer dans la collection des Scriptores rerum germanicarum le travail d’érudition de Giesebrecht, qui aurait ainsi servi d’introduction aux annales consignées. Réunissant tous les souvenirs des contemporains et toutes les indications éparses dans les monumens dispersés, M. Giesebrecht s’est identifié avec le chroniqueur primitif, s’est pénétré de l’esprit qui dirigeait sa plume, a cousu habilement les traditions subsistantes dans d’autres chroniqueurs de ce temps, qui avaient puisé à la même source que le moine anonyme d’Altaha, et du tout a fait un livre du plus haut intérêt pour l’histoire du XIe siècle. Enfin le talent mûri de M. Giesebrecht, l’un des plus ingénieux et des plus savans historiens formés à l’école de M. Ranke, s’est exercé dans un ouvrage de haute portée, lentement élaboré et non encore achevé, l’Histoire de l’empire allemand (Geschichte der deutschen Kaiserzeit), dont le troisième volume tout entier (de 1,224 pages) est consacré à l’histoire du conflit de l’empire avec la papauté sous les deux derniers empereurs franconiens. Ce remarquable volume laisse loin de lui le livre de Luden[1], qui mérite toujours cependant une lecture attentive, et qui donne sur l’époque franconienne des conclusions si précieuses. Luden et Giesebrecht ont fait oublier les compilations de Mascov et de Struve[2], sans ébranler la réputation acquise des histoires spéciales de Stenzel et de Floto. Enfin la volumineuse et très savante histoire de Grégoire VII et de ses contemporains, composée par l’érudit Gfrörer, professeur d’histoire à Fribourg en Brisgau, est un immense répertoire où les événemens qui ont agité l’Europe pendant le siècle grégorien sont retracés quelquefois avec un enthousiasme partial, toujours avec un savoir profond. Les sept volumes de ce livre sont un monument historique d’une grande valeur. Tous ces trésors ont manqué à M. Villemain, et l’on ne s’en doute que rarement en le lisant.

Les textes améliorés ou nouveaux insérés dans la grande collection de M. Pertz ne pouvaient plus être qu’entrevus par lui à l’époque où ils ont été livrés à la publicité. Les Monumenta gregoriana de M. Jaffé lui sont restés inconnus. Il n’avait pu même faire usage de la belle publication des œuvres de Gerbert, de M. Olleris, quoiqu’il ait tiré dans son introduction grand parti des actes du synodus remensis, où Gerbert a joué un rôle si marqué. N’ayant pas disposé des abondans documens récemment mis au jour sur l’histoire de la dynastie franconienne, les agitations intérieures de l’Allemagne pendant le XIe et le XIIe siècle laissaient des doutes dans

  1. Luden, Geschichte des deutschen Volkes. Gotha, 9 vol. in-8o.
  2. Corpus historiœ germanicœ, auct. B. G. Struve ; Iena, 1730, 2 vol. in-fol. — I. I. Mascovii, De reb. imperii germamici, sub Henrico IV et V ; Lips. 1748, in-4o.