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des procédés extérieurs, mais des principes ; ce qu’ils voulaient enfin, aussi contrairement aux témérités romantiques qu’à l’inerte despotisme exercé depuis la fin du XVIIIe siècle par les apôtres d’une fausse érudition, c’était reconnaître scientifiquement les conditions de l’art, en observer les progrès, en consulter attentivement l’histoire, et, comme on le disait assez récemment ici même[1], s’autoriser de cette expérience pour agir plus sûrement dans le sens de nos mœurs ou de nos besoins.

Associé le dernier à l’entreprise, M. Vaudoyer s’y dévoua, dès son arrivée à Rome en 1827, avec toute l’ardeur de ses jeunes espérances, et plus tard avec une énergie croissante, à mesure que cette lutte engagée contre l’esprit de routine intéressait plus directement l’honneur de ses amis et le sien ; mais, en défendant ainsi la cause commune, il savait agir pour son propre compte, j’entends en raison de ses aptitudes spéciales, de son goût, de ses prédilections. Aussi, quelle que soit la conformité de sa doctrine et de ses croyances générales avec les préceptes soutenus par les trois artistes dont il a si utilement secondé les efforts, il garde au milieu d’eux, nous le répétons, sa physionomie propre, comme eux-mêmes d’ailleurs ont chacun une fonction distincte et, dans le talent, un caractère dominant. On a dit de Duban qu’il était pompéien, de M. Labrouste qu’il avait francisé l’art étrusque, de M. Duc qu’il représentait dans l’école moderne l’art grec modifié et rajeuni ; on dirait à meilleur droit encore que, par ses inclinations principales, par le tempérament qu’il accuse, le talent de M. Vaudoyer est de race romaine. Non-seulement c’est à Rome que ce talent s’est formé, non-seulement la belle restauration du Temple de Vénus et Rome, les études si consciencieusement faites d’après l’arc de Septime Sévère et plusieurs monumens antiques du même genre, beaucoup d’autres dessins encore exposés à l’École des Beaux-Arts attestent la profonde connaissance que l’artiste avait acquise sur place de l’architecture romaine et de ses œuvres ; mais les grands travaux exécutés sous sa direction à Paris et à Marseille montrent clairement que l’expression de la majesté était chez lui le résultat d’une faculté naturelle aussi bien que le fruit de l’éducation. En restant fidèle aux souvenirs de sa jeunesse, il obéissait en même temps à ses plus impérieux, à ses plus vrais instincts.

L’exposition des dessins de M. Vaudoyer présente sous des formes visibles, elle confirme par un exemple pratique les enseignemens que les écrits de la nouvelle école archéologique tendent à propager parmi nous. En face de ces œuvres inspirées à la fois par un respect passionné pour l’art antique et par un désir non moins vif

  1. Voyez, dans la Revue du 1er février 1872, Félix Duban.