Page:Revue des Deux Mondes - 1873 - tome 104.djvu/675

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
LA
PHYSIOLOGIE DE LA MORT

LA MORT APPARENTE ET LA MORT REELLE.

Jadis les dépouilles de la mort étaient le lot de l’anatomiste, tandis que le physiologiste avait en partage les phénomènes de la vie. Aujourd’hui on soumet le cadavre aux mêmes expériences que l’organisme vivant, et l’on recherche dans les débris de la mort les secrets de la vie. Au lieu de ne voir dans le corps inanimé que des formes prêtes à se dissoudre et à disparaître, on y découvre des forces et des activités persistantes dont le travail est profondément instructif. De même que les théologiens et les moralistes nous invitent à contempler quelquefois face à face le spectre de la mort et à fortifier notre âme dans une courageuse méditation de l’heure dernière, la médecine considère comme une nécessité de nous faire assister à tous les détails de ce drame lugubre pour nous conduire, à travers les ombres et les obscurités, à une science plus claire de la vie ; mais cela n’est vrai que de la médecine la plus moderne.

Leibniz, qui avait une profonde et admirable doctrine de la vie, en avait une aussi de la mort, qu’il a exposée dans une lettre célèbre à Arnauld. Il pense que la génération n’est que le développement et l’évolution de quelque animal déjà formé, et que la corruption ou la mort n’est que l’enveloppement et l’involution de ce même animal, qui ne laisse pas de subsister et de demeurer vivant. La somme des énergies vitales consubstantielles aux monades ne varie pas dans le monde ; la génération et la mort ne sont que des