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entrefaites arrive de Vienne le prince Charles de Solms, beau-frère du roi, général autrichien, chargé d’une mission de l’empereur. François-Joseph est résolu d’accepter la lutte pour la formation future de l’Allemagne ; il attache le plus grand prix à être entouré dans cette crise par les princes allemands, comme il l’a été à la convocation de Francfort…

— Où l’on m’a voulu médiatiser, murmure le roi, non sans méfiance.

— L’empereur désire avant tout une ferme alliance avec le Hanovre, regardant comme identiques les intérêts de la maison de Habsbourg et ceux de la maison des Guelfes.

— La maison des Guelfes a toujours combattu le césarisme, dit le roi.

— L’empereur trouve qu’au congrès de Vienne le Hanovre n’a pas obtenu la position qui lui était due dans l’Allemagne du nord.

— Parce que les efforts du comte de Munster n’ont pas été soutenus par Metternich, riposte le roi, s’obstinant à se souvenir.

— L’empereur reconnaît la nécessité de réparer cette faute du congrès dans la nouvelle formation de l’Allemagne, et propose pour cela une alliance offensive et défensive.

— Sur quelles bases ?

— Les voici : le Hanovre préparera immédiatement son armée pour la guerre qu’il prendra l’engagement de déclarer à la Prusse, de concert avec l’Autriche. En échange, l’empereur met à la disposition du Hanovre la brigade Kalik, qui se trouve en Holstein, et lui cède pour la durée de la campagne le général de Gablenz. Il garantit, quelle que soit l’issue, l’intégrité du Hanovre, et lui promet en cas de victoire le Holstein et la Westphalie prussienne.

À cette dernière proposition, tous les sentimens de l’honnête roi George se révoltent. Il y a là une question de principes. Son avis est qu’une guerre entre deux membres de la confédération est impossible d’après les lois mêmes de la confédération ; si elle se présente, il l’acceptera comme un fléau de Dieu, mais loin de lui l’impiété de conclure des traités en vue d’une telle réalité ! Jamais il ne combattra des Allemands autrement qu’en cas de légitime défense, jamais il n’acceptera les offres qu’on lui fait pour l’agrandissement du Hanovre. Il s’enorgueillit que dans le pays gouverné par lui il n’y ait pas un pied de terre qui n’appartienne en propre à sa maison, et il respecte le bien du prochain, comme il prétend qu’on respecte le royaume qui est à lui par la grâce de Dieu.

— Ainsi parle ce doux prince aveugle, digne de vivre au temps des légendes, et dont les raisonnemens naïfs ont dû fort divertir en leur sagesse pratique le roi Guillaume et son grand-chancelier.

— C’est un noble, un aimable caractère que celui de mon cousin