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conclu en 1869 entre la fille unique du roi de Suède Charles XV et le prince héritier de Danemark. La nation danoise appréciait certainement les qualités de ce roi Charles qui est mort au mois de septembre dernier, emportant dans sa tombe les sympathies de toute la race Scandinave, mais elle n’avait pas songé pour cela à une fusion avec la Suède, et son bon sens lui a fait comprendre que des passions antidynastiques, éclatant dans une situation déjà si troublée, auraient eu probablement pour résultat de créer à Copenhague et dans les provinces une anarchie semblable à celle de la Pologne au moment des partages. En définitive, Christian IX et Charles XV n’ont cessé d’entretenir les meilleurs rapports, et Oscar II, le nouveau souverain de la Suède et de la Norvège, se montre animé des mêmes sentimens que son prédécesseur.

Le roi de Danemark a aussi des amis dans les familles régnantes de Russie et d’Angleterre. Sans doute les alliances matrimoniales entre princes et princesses n’ont plus aujourd’hui la même importance que dans les siècles précédens ; mais elles ont encore leur valeur politique. En mariant deux de ses filles, l’une avec l’héritier de la couronne d’Angleterre, l’autre avec l’héritier de la couronne de Russie, le roi de Danemark a probablement affermi les bases sur lesquelles repose l’indépendance de son royaume. Cependant ces unions si brillantes n’ont pas suffi pour écarter les malheurs qui pèsent sur le pays, et, malgré les sympathies de Londres et de Saint-Pétersbourg, l’affaire du Slesvig septentrional, qui fut, avec la question du Luxembourg et l’incident d’Espagne, une des origines de la lutte entre la France et l’Allemagne, n’a pas encore été réglée.

On avait pensé un instant que la présence de l’empereur de Russie à l’entrevue de Berlin amènerait peut-être une solution ; il n’en a pas été ainsi, et la presse allemande a pris à tâche de détruire ce qu’elle appelle les illusions danoises. Le président du gouvernement du Slesvig a déclaré en août aux autorités municipales de Flensborg que la province devait renoncer à toute idée de rétrocession d’une partie de son territoire. On a signalé en même temps parmi les districts mixtes l’application rigoureuse de mesures qui doivent assurer l’emploi de la langue allemande dans les écoles et dans l’administration communale. Tous ces symptômes n’étaient pas de nature à encourager des espérances que le cabinet de Copenhague avait été assez prudent pour n’accueillir qu’avec une grande réserve. Toutefois les questions relatives à la position des habitans du Slesvig du nord qui ont opté pour la nationalité danoise ont été réglées en septembre par suite d’un accord entre les cabinets de Berlin et de Copenhague. Il ne restait plus alors que deux catégories d’émigrés, ceux qui avaient fait leur choix avant l’ouverture des hostilités entre la France et l’Allemagne, et ceux qui avaient passé en Danemark après l’ordre de mobilisation des troupes allemandes. Le