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Page:Revue des Deux Mondes - 1873 - tome 106.djvu/431

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les précautions qu’on apporte au travail de ces produits, ne sauraient d’ailleurs en restreindre désormais la fabrication. Le perfectionnement graduel des procédés fera disparaître de plus en plus les causes et les occasions de péril, soit qu’il ait pour résultat de livrer au commerce des produits plus purs et par suite plus stables, — car beaucoup d’accidens sont dus à l’impureté des matières, — soit qu’il se traduise par la découverte de moyens propres à diminuer la tendance, mais non la puissance explosive[1].

Les matières explosives ne présentent pas seulement de grandes différences sous le double rapport de la force déployée et de la rapidité de la déflagration, elles se distinguent encore par le mode d’amorce, c’est-à-dire par les moyens qu’il faut mettre en œuvre pour les faire partir. Les unes se décomposent facilement sous l’action de la chaleur, — une température de 270 degrés suffit pour la poudre de guerre, de 320 degrés pour la poudre de chasse extra-fine, — les autres s’enflamment par le choc, d’autres enfin exigent l’intervention de l’étincelle électrique. Dans beaucoup de cas, il est vrai, on ne discerne pas nettement si c’est la chaleur ou le choc de l’explosion de l’amorce qui fait partir la cartouche. M. Abel a constaté que la quantité de fulminate de mercure exigée pour faire détoner le coton-poudre comprimé est plus forte que celle qui suffit pour la nitroglycérine, et qu’en substituant au fulminate une amorce de nitroglycérine ou d’iodure d’azote on ne réussit pas à enflammer le fulmi-coton. Quant à la dynamite, qui s’amorce avec des capsules de fulminate, on ne peut la faire détoner ni par la chaleur, ni par le choc, ni par l’étincelle électrique, lorsqu’elle est enfermée dans des cartouches peu serrées. Le froid paralyse la dynamite; à 10 degrés au-dessous de zéro, il est très difficile d’obtenir la détonation. Il y a là l’indice d’actions moléculaires de tonalités diverses, si on peut dire, et qu’on n’excite que par des vibrations sympathiques : il faut que la détonation de l’amorce soit à l’unisson de la matière explosive. MM. Champion et Pellet ont abordé cette question par des expériences directes qui ont donné des résultats assez curieux, quoique encore incomplets. Ayant placé un peu d’iodure d’azote humide sur une contre-basse, ils ont obtenu l’explosion en promenant l’archet sur les cordes hautes, tandis que les sons graves restaient sans influence. On a disposé ensuite une série de flammes

  1. La « poudre brune » de la fabrique de M. Schultze, de Potsdam, qui a été essayée à Vincennes en 1865, et qui n’est, paraît-il, qu’une imitation du fulmi-coton, — de la sciure de bois traitée par l’acide nitrique, — a l’avantage de donner peu de fumée et d’offrir peu de danger, car le mélange définitif des ingrédiens ne s’opère qu’au moment de l’emploi ; cependant elle est loin d’avoir l’importance que l’inventeur lui attribuait.