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plus à la trigonométrie et à l’algèbre; on les sacrifie à la grammaire comparée, à la philologie, à l’épigraphie, à la paléographie. Les théoriciens de l’éducation réelle se sont emparés de la circulaire de M. Jules Simon, et par leurs commentaires ils l’ont dénaturée. Ébloui sans doute du bruit qu’il faisait, le ministre lui-même a transformé sa circulaire en programme. Il n’a plus conseillé, il a commandé; il n’a plus voulu empêcher l’abus, il a proscrit l’usage : thème latin, discours français, mot-à-mot, livres de classe, tout a été aboli d’un coup dans le travail du collège. La circulaire devenait ainsi un nouveau traité des études qui avait pour principe le néant. Aujourd’hui le mal est visible pour tous les bons esprits, et le conseil supérieur de l’instruction publique au mois de juillet dernier s’est mis à l’œuvre pour le réparer. Puisque la question a été portée devant le public par la circulaire de M. Jules Simon et par la presse, puisque le procès des exercices scolaires doit être instruit à nouveau par l’autorité compétente avant la prochaine année classique, nous voudrions défendre ici ces modestes exercices, qu’on a si vivement attaqués, en expliquer le but, en faire toucher du doigt l’utilité, et, si le mot n’est pas trop ambitieux, en exposer la philosophie. Oui, il y a une philosophie dans le discours et dans le thème latin, il y en a une bien simple et bien profonde jusque dans l’humble grammaire de Lhomond, qui paraît si plate et si dénuée de logique à ceux qui vivent dans le commerce de Bopp et de Diez. C’est par Lhomond et par le thème latin que nous devrions commencer pour suivre l’ordre naturel des choses, mais nous ne voulons pas effrayer nos lecteurs en les jetant tout de suite en pleine langue latine. Nous choisirons d’abord le plus littéraire et le plus mondain de nos exercices d’école : nous traiterons du discours.


I.

Aucun de nos lecteurs n’ignore que la classe de rhétorique dans les établissemens universitaires comporte deux espèces de discours, le discours français et le discours latin. Il est inutile que dans cette défense des études classiques nous les distinguions l’un de l’autre. Les partisans de l’enseignement réel ne font pas de distinction dans l’attaque; ils n’épargnent pas plus le premier que le second. Français ou latin, c’est le discours, genre faux par excellence, qui vicie l’enseignement tout entier, car, selon eux, l’enseignement tout entier ne serait donné depuis la sixième qu’en vue de cet exercice final. Cependant ces ennemis du discours souhaitent qu’on exerce de bonne heure les jeunes gens et même les enfans à écrire dans leur langue maternelle. Ils permettent et au besoin ils recommandent