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même pour toutes les autres, Crown-Point, Chollar, Potosi, non moins recherchées, mais dont la cote était au-dessous des précédentes. Toutes ces actions étaient dès lors cotées à la bourse de San-Francisco.

Quelque riches que fussent ces mines, la production d’argent, la première année de l’exploitation, en 1860, n’avait pas atteint 100,000 dollars. Les procédés d’excavation et de traitement étaient encore fort grossiers, et l’on perdait une grande partie du précieux métal; mais, dès l’année 1861, les méthodes se perfectionnaient, et la production atteignait au-delà de 2 millions de piastres. En 1862, elle dépassait 6 millions; en 1863, 12 millions. Jamais pareille chose, en aucun temps, ne s’était vue. Virginia-City, qui avait alors 15,000 habitans, produisait plus d’argent que Potosi de Bolivie ou Guanajuato du Mexique n’en produisirent jamais, alors qu’elles avaient, la première 150,000 habitans, la seconde 100,000, et fournissaient chacune 10 millions de piastres par an. Virginia dépassait déjà 12 millions et devait bientôt atteindre 16. Ce dernier chiffre donnait 950 dollars par tête d’habitant, et 2,800 par tête de mineur, car on compte à Virginia-City 5,000 mineurs et ouvriers des usines. Ce simple fait explique le renom dont le Comstock jouit encore, et l’attraction irrésistible que les filons de Nevada ont exercée dans le principe sur l’esprit de tous les émigrans du far-west.

A toute médaille il y a un revers. Le mouvement de baisse commença après l’été de 1863, époque où les actions minières atteignaient les cours fabuleux que nous avons relevés. On se mit à supputer les millions enfouis dans quelques-unes des mines, qui, fouillées pendant deux ou trois ans, n’avaient pas encore rendu un rouge liard. D’autres, qui avaient vu les mines d’argent à l’étranger, annonçaient que, si nulle part on n’avait exploité des dépôts de ce métal d’une richesse continue, sauf à Comstock, ici le coût onéreux de l’exploitation absorbait presque tous les bénéfices. Il était du reste notoire que beaucoup de sociétés minières ne s’étaient formées que pour tromper le public, en lui faisant acheter des valeurs correspondant à des mines imaginaires.

Les actions allèrent ainsi baissant peu à peu. Au milieu de l’année 1864, une véritable panique se déclara. Les banquiers, affolés, craignirent un moment une ruine complète, car on vit un pied de la mine Gould-and-Curry tomber à 900 dollars, Savage à 750, Ophir à 425, Hall-and-Norcross à 310, c’est-à-dire que les actions minières ne valaient plus que le sixième à peu près de ce qu’elles valaient un an auparavant. Depuis lors des hausses et des baisses quelquefois instantanées ont continué à se produire, mais dans des proportions moins étendues, en arrivant insensiblement à un taux