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tendu à perfectionner les instrumens de toute sorte à l’usage de l’industrie nationale, agricole, manufacturière et commerciale, qui ont été énumérés plus haut? S’est-il hautement proposé d’augmenter la puissance productive de la nation par les moyens généraux dont l’histoire lui garantissait l’efficacité par d’éclatans exemples ?

Le grand orateur, le chef et l’âme de ce gouvernement, eut le mérite de comprendre que la France périrait, si l’on ne restaurait ses finances, profondément bouleversées. Il s’appliqua résolument à cette tâche patriotique, qui se divisait nettement en deux parties. D’une part, il fallait achever de solder les comptes de la guerre, y compris la somme de plus de 1 milliard 1/2 prise à la Banque de France, ainsi que les dépenses courantes de l’armée d’occupation que les Allemands avaient laissée chez nous, et se débarrasser de ces hôtes incommodes en leur payant les 5 milliards dont ils avaient fait une des stipulations absolues du traité de paix. D’autre part, il fallait dresser un budget dans lequel les dépenses ordinaires ou réputées telles, forcément accrues d’une somme énorme, fussent balancées par des recettes correspondantes. A la première partie de l’œuvre, M. Thiers consacra des efforts bien conçus qui furent couronnés d’un succès brillant. L’époque convenue dans le traité de Francfort pour le versement des 5 milliards fut notablement devancée. Dès le mois de mars 1873, les voies et moyens de cette opération souhaitée avec impatience par un public frémissant étaient assurés.

Des hommes très compétens, des esprits réfléchis, familiers avec les principes et la pratique, ont émis des critiques au sujet de la méthode suivant laquelle on s’est procuré la somme voulue pour cette grande opération de la libération du territoire. Ils ont signalé des défauts dans le mécanisme mis en usage pour la négociation de l’emprunt; on a dit que le procédé fixé pour la souscription laissait à désirer, qu’il avait fait payer trop cher au trésor les ressources obtenues, que les frais mêmes de la négociation avaient été excessifs, qu’il eût été possible d’émettre une partie de l’emprunt sous une forme qui eût davantage alléché le public souscripteur et lui eût fait rabattre quelque chose de ses prétentions. On a représenté encore qu’il n’eût pas été impossible de trouver une partie des fonds nécessaires autrement que par l’emprunt, qu’à cet effet on aurait pu exiger des contribuables une imposition extraordinaire et exceptionnelle à verser une fois pour toutes, qu’elle eût été apportée avec empressement, et que le public s’y attendait. Ces observations ne sont pas dénuées de fondement, et il sera bon, le cas échéant, qu’on s’en souvienne; mais dans d’aussi grandes affaires