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furent cerclés de torsades de parchemin cousues à la pièce ou de tresses en paille, en jonc, en cordelettes, ce qui se pratiqua surtout au XVe siècle. À cette époque, des établissemens religieux, des universités, encastraient même leurs sceaux dans des boîtes de diverses matières, moyen au reste peu efficace.

Un danger non moins sérieux était la perte du sceau. Le propriétaire pouvait ainsi se trouver engagé malgré lui, si celui qui l’avait dérobé ou trouvé en faisait usage. De la nécessité d’informer solennellement le public de la perte de la matrice ; acte en était dressé à la requête de l’intéressé à la chancellerie ou devant quelque juridiction. Un sûr moyen de se mettre en défense contre le faussaire consistait à déposer un double de la pièce scellée dans quelque abbaye ; la confrontation des duplicatas servait ainsi à vérifier la validité de l’acte. Il importait également que, le propriétaire du sceau mort, on ne pût faire usage de ce sceau et créer ainsi des obligations antidatées pour ses héritiers. Voilà pourquoi au décès de la personne son sceau était brisé ; on le déposait quelquefois aussi dans son tombeau. C’est ce qui explique la découverte de sceaux dans des sépultures. J’ai déjà parlé du sceau de Childéric, qui avait été placé dans son tombeau à Tournay. Lorsque les tombes royales furent violées à Saint-Denis, on découvrit dans celle de la reine Constance de Castille, femme de Louis VII, le sceau de cette princesse. La précaution de détruire le sceau était surtout nécessaire pour les sceaux des souverains. Ne lit-on pas dans les mémoires de Sully qu’après la mort de Henri IV le chancelier conserva le sceau royal et s’en servit pendant plus de cinq années pour sceller de fausses lettres patentes ? On mettait conséquemment hors d’usage les sceaux qui ne devaient plus servir, et déclaration en était dressée devant une juridiction qui procédait publiquement à la rupture, à la cancellation du sceau. Aux funérailles du pape, on rompait le côté de son sceau où son nom était inscrit. En France, le prieuré de La Saussaye, près Villejuif, jouissait du privilège, à la mort du roi, de recevoir les sceaux qui avaient été brisés.

L’usage de sceller devint graduellement au moyen âge si universel que chaque individu libre voulut avoir son sceau, les bourgeois comme les seigneurs et même les paysans. Chaque établissement civil ou religieux s’en fit aussi graver. Quand par hasard on n’en possédait pas ou qu’on ne l’avait pas sur soi au moment où il importait de s’en servir, on empruntait le sceau d’un parent, d’un ami, d’un des co-témoins ; mais alors l’acte devait en faire mention. Quelquefois on se servait dans la même occasion du sceau d’une juridiction ou de celui d’un établissement religieux voisin. Trouvait-on que son sceau n’avait pas assez d’autorité, on faisait apposer de plus celui d’un grand feudataire, d’un seigneur dont on