ment à Saint-Brieuc, Saint-Malo, Saint-Servan, Granville, Dieppe et Fécamp. Les navires des bancs partent dans les premiers jours de mars, chargés de sel et de marchandises diverses à destination de Saint-Pierre. Ce sont en général des trois-mâts et des bricks, jaugeant de 100 à 300 tonneaux, ayant en moyenne de 15 à 30 hommes d’équipage, et dont les effectifs s’augmentent au départ d’un personnel nombreux payant son passage pour aller s’engager à Saint-Pierre pendant la saison de pêche. Le temps n’est pas éloigné où ces bâtimens, lourdement construits, hors d’âge et médiocrement armés, paraissaient pour la plupart incapables de résister aux coups de vent de l’Océan ; les désastres étaient alors fréquens, et trop souvent ils avaient pour cause la sordide avarice qui présidait aux armemens. Ce déplorable état de choses s’est heureusement amélioré. Déjà le progrès devient sensible ; on peut voir aujourd’hui sur les bancs des navires neufs et bons marcheurs.
Le gouvernement, pour encourager les armateurs, constitue des primes en leur faveur dans les conditions suivantes. Les bâtimens expédiés par les ports de France sont armés avec sécheries ou simplement avec salaison à bord. Dans le premier cas, l’armateur s’engage à faire sécher le poisson sur les graves de Saint-Pierre ou de la côte nord-est de Terre-Neuve ; il est alors tenu, pour avoir droit à la prime de 50 fr. par homme, d’avoir au moins 50 hommes d’équipage, si le bâtiment jauge 158 tonneaux ou au-dessus, — 30 hommes au moins, si le tonnage est compris entre 100 et 158 tonneaux, — 20 hommes au moins, s’il est inférieur à 100 tonneaux. Les navires armés avec salaison à bord ont droit à la prime de 30 francs par homme ; le minimum de leur effectif n’est pas fixé. À moins de mauvais temps exceptionnels, les bancquiers sont réunis sur la rade de Saint-Pierre vers le 20 avril, et c’est alors que les Anglais de la côte sud de Terre-Neuve leur apportent la boitte ou l’appât de la première pêche. La morue se prend à la ligne ; on amorce, suivant la saison, avec du hareng, du capelan ou de l’encornet. Ces trois poissons de passage se succèdent chaque année dans les eaux de Terre-Neuve à peu près aux mêmes époques. Au printemps, le hareng se présente en bandes serrées dans les baies de la côte anglaise ; nos voisins le prennent à la seine et viennent aussitôt le vendre à nos pêcheurs. Dès qu’ils sont en vue de Saint-Pierre, les capitaines des navires bancquiers vont à leur rencontre. Le marché s’établit au large, on discute bruyamment, tout en faisant route, et, quand on arrive en rade, le cours du jour est fixé. Le capelan fait son apparition vers le 15 juin. On le pêche sur les côtes de Terre-Neuve et de Saint-Pierre et Miquelon ; il a pour habitude de frayer au rivage ; souvent la mer l’échoue sur les grèves,