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relever des déchéances dont l’empire a été frappé. Quand ce ne sont ni les bonapartistes ni les légitimistes, ce sont les radicaux, qui ont la prétention de nous imposer leur république de droit divin. Ils s’offrent tous à sauver la France, à la condition, bien entendu, que cette bonne France commence par se livrer à eux, les reconnaissant pour maîtres et seigneurs, et, comme ni les uns ni les autres ne peuvent rien, comme ils ont tous échoué jusqu’ici dans leurs tentatives, leur dernière ressource est de faire de leur impuissance une politique, de prolonger systématiquement un provisoire où ils puissent du moins continuer leurs brigues et leurs agitations. L’idéal pour eux, c’est cette sédition en permanence de toutes les compétitions de partis en face d’un pays laissé sans institutions et d’un gouvernement livré au hasard des mouvemens de tous les jours, sans organisation précise, sans les moyens qui lui sont le plus nécessaires pour vivre.

C’est avec cette situation équivoque, ruineuse, qu’il faut en finir. C’est la question qui va s’élever dès les premiers jours de la session à Versailles. Elle est du reste plus qu’à demi engagée par une série d’actes parlementaires communs aux deux gouvernemens qui se sont succédé depuis deux ans, par ce qu’on pourrait appeler la procédure préliminaire de l’organisation des pouvoirs publics. C’est la tactique des partis hostiles d’obscurcir sans cesse tout ce qui a été fait, de prétendre arrêter en chemin même des résolutions souveraines. En réalité, la question est née ou a été formulée pratiquement dès la fin de 1872. C’est la première commission des trente qui commençait ce travail, et c’est l’assemblée elle-même qui, par un acte du mois de mars 1873, décidait la présentation d’un ensemble, de lois constitutionnelles sur la création d’une seconde chambre, sur la transmission du pouvoir exécutif aussi bien que du pouvoir législatif. Les projets constitutionnels que M. Dufaure proposait quelques jours avant la chute de M. Thiers n’étaient que l’exécution fidèle de cette décision souveraine, dont le 24 mai a pu surprendre momentanément l’effet sans l’abroger, sans anéantir même les projets de M. Dufaure. Lorsque la prorogation septennale a été votée en faveur de M. le maréchal de Mac-Mahon, la loi du 20 novembre 1873 a rappelé plus que jamais la nécessité de l’organisation constitutionnelle réclamée par M. le président de la république lui-même. La nouvelle commission des trente nommée pour faire honneur à cet engagement s’est trouvée ainsi être l’héritière de la première ; elle avait à poursuivre la même œuvre, elle l’a continuée avec une lenteur qui a eu parfois besoin d’être stimulée. Tout se lie en définitive dans ce travail souvent interrompu, toujours repris, et la proposition de M. Casimir Perier, qui avait l’air d’une grande nouveauté, cette proposition elle-même ne faisait que rassembler et rappeler tous ces actes, en pressant la solution, en précisant aussi un peu plus, si l’on veut, le caractère de cette solution. Jusqu’ici, tout bien compté, au moment où la session va