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Page:Revue des Deux Mondes - 1874 - tome 6.djvu/660

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même conservé le nom d’un de ces personnages au temps de Marc-Aurèle. Nous lisons sur un de ces monumens : « à la divinité des empereurs et au génie des contributions indirectes, » tant il est vrai que Rome divinisait tout, et que, principalement en face du monde barbare, elle cherchait à frapper l’esprit de ces peuples par la majesté de l’empire, en rendant sacro-saint tout ce qui touchait à l’organisation de la conquête, depuis le service de la douane jusqu’à l’aigle légionnaire.

Nous savons que la ligne des douanes suivait le Danube pour ce qui regarde la province de Pannonie, et un monument du musée de Pest nous révèle l’existence de postes de surveillance élevés sur la rive de ce fleuve non pas pour s’opposer aux incursions des barbares, comme l’a cru M. Henzen, mais pour empêcher la contrebande (burgis,… ad clandestinos latrunculorum transitus oppositis). Afin d’assurer et de défendre la nouvelle conquête, il était indispensable d’augmenter l’effectif des régions danubiennes ; aussi dès l’an 105 trouvons-nous la Pannonie dédoublée en deux provinces impériales, toutes deux consulaires. Nous connaissons, grâce aux monumens épigraphiques, l’organisation militaire, politique et religieuse de ces pays, nous connaissons les légions, les cohortes auxiliaires, les ailes de cavalerie qui y ont stationné et la durée de ces garnisons ; nous savons où se trouvaient leurs principaux détachemens, nous avons enfin les cadres des officiers et des sous-officiers. M. Robert dans son Tableau des légions romaines, M. Gaston Boissier dans les considérations si justes qu’il a présentées ici même, sur les avantages de l’organisation militaire romaine, ont fait comprendre que ces précieuses traditions de discipline, exemple vivant de l’obéissance aux lois et à la fois école salutaire des hommes destinés à commander, nous dévoilent plus que tout le reste peut-être le secret de la conservation de l’empire. Un cordon de colonies romaines s’éleva aux abords du Danube, et beaucoup d’entre elles rappellent le nom de famille de Trajan, colonia Ulpia Pœtoviensis (Pettau), colonia Ulpia Ratiaria (Rzer-Palanka, au-dessous de Vidin, sur le fleuve, en Bulgarie), colonia Ulpia Oescus (Gighen sur les bords de l’Isker, ancien fleuve Oescus), colonia Trajana Sarmizegethusa, Trajanopolis, enfin Marcianopolis, de Marcia, sœur de l’empereur, Plotinopolis, de Plotine, sa femme. Les deux noms encore aujourd’hui les plus populaires dans toute la vallée du Bas-Danube sont ceux de Trajan le conquérant organisateur et de Justinien le grand constructeur.

La conquête de la Dacie était à peine achevée que le légat de la province impériale consulaire de Syrie, Cornélius Palma, s’emparait de Petra et de Bostra et réduisait l’Arabie en province romaine