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Page:Revue des Deux Mondes - 1874 - tome 6.djvu/826

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ces résultats furent obtenus. Jamais nos finances n’ont été conduites avec tant de prévoyance, de rigueur, d’honorable et nécessaire parcimonie que par MM. Louis, Corvetto et de Villèle.

Les ministres de la restauration eurent pour premier principe de respecter scrupuleusement tous les engagemens des régimes antérieurs. Des membres exaltés du côté droit de la chambre demandaient qu’on répudiât les dettes formant l’arriéré de l’empire, ou qu’on les payât en 5 pour 100 au pair, quoique ce fonds d’état fût alors à des cours fort inférieurs. Le gouvernement eut la probité et l’intelligence de se refuser à de semblables mesures. Il chercha à se rendre un compte exact du fardeau qui allait peser sur lui sans essayer d’en rejeter une partie ; il recourut à la fois au crédit public et à l’impôt pour faire face au capital, à l’intérêt et à l’amortissement de cette charge. Du 1er avril 1814 au 1er août 1830, la restauration émit 164,779,000 francs de rentes nouvelles, sans compter celles qui furent créées en remplacement des rentes 5 pour 100 converties en 1825. Ces émissions successives venant s’ajouter aux 63 millions de rentes existantes au 1er avril 1814 auraient porté lors de la révolution de juillet à 228 millions de francs en chiffres ronds le total des arrérages de la dette consolidée de la France ; mais, par la conversion de 1825, il y eut une réduction de plus de 6 millions sur les intérêts annuels de la dette, l’amortissement racheta pendant la même période près de 54 millions de rentes, et 3 millions 1/2 de rentes furent annulées après avoir fait retour à la couronne. Aussi au 1er août 1830 la dette consolidée de la France ne s’élevait qu’à 164 millions 1/2 en arrérages. Ce chiffre était minime, si l’on tient compte de la diversité et de l’étendue des engagemens auxquels il avait fallu pourvoir. La dette de la France à cette époque ne représentait pas le quart de celle de l’Angleterre, dont le service exigeait 718 millions par année, et elle ne dépassait guère en capital la dette de la Hollande.

Il y aurait beaucoup à dire sur les emprunts contractés par la restauration, tant sur les méthodes que sur les taux d’émission. Un emprunt peut être négocié avec de grandes maisons de banque sans que l’on provoque entre elles une concurrence ; il peut encore être placé fractionnairement à la Bourse par les agens du trésor : il peut être contracté avec des banquiers ou des réunions de capitalistes par le procédé de l’adjudication, c’est-à-dire attribué au groupe de financiers qui font les conditions les meilleures après une mise aux enchères ; il peut enfin être directement émis sans intermédiaire par la voie d’une souscription publique, l’état fixant le taux d’émission, les modes de versement, et recevant lui-même les offres de tous les capitalistes, grands, moyens ou petits. Ces diverses méthodes ont été soit successivement, soit simultanément employées