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1° La lettre officielle (dont nous avons la copie sous les yeux) par laquelle M. Serpiéri informe le ministre de France à Athènes, M. J. Ferry, que le 27 février il a signé avec M. Syngros, administrateur de la banque de Constantinople, « une convention, dit la lettre, par laquelle je cède à cette dernière tant en mon nom qu’à celui de la société Mon Roux et Cie, toutes nos propriétés et tous nos droits dans la commune du Laurium, moyennant la somme de douze millions et demi de francs. »

2° Le passage suivant d’une brochure (Description des produits des mines du Laurium et d’Oropos, etc. Athènes 1875) publiée par M. Cordellas, ingénieur des mines du Laurium. D’accord avec M. Syngros sur le chiffre de 11,500,000 francs, que contredit la lettre officielle, M. Cordellas ajoute, p. 43 : « La société des mines du Laurium fut alors formée avec un capital nominal de 20 millions, représenté par 100,000 actions, qui toutes furent distribuées dans le pays. »

M. Syngros donné le détail de l’opération de banque qui eut lieu alors. En pareil cas, le public s’inquiète surtout des résultats obtenus. Or voici ce qu’en dit M. Cordellas : « Le peuple athénien, mal éclairé par les rapports de la commission hellénique et par la presse, qui ne cessait d’attirer l’attention publique sur les immenses richesses, hélas ! imaginaires, contenues dans les ecvolades (terres rejetées par les anciens), se jeta aveuglément sur les actions, et cela avec tant d’ardeur que ces dernières firent jusqu’à 200 francs de prime,… et c’est ainsi que fut introduit chez nous le jeu de bourse, si funeste à l’industrie, surtout lorsqu’il s’agit de mines… La loi (qui imposait 53 pour 100 sur les produits du Laurium) à peine promulguée, on voit les actions perdre leur prime, leur valeur, et arriver successivement de chute en chute au chiffre dérisoire de 60 francs. Voilà donc une affaire pleine d’avenir et de prospérité, dont la valeur est portée de 25 millions à 35 millions, et qui tombe en peu de temps à 6 millions… La Société vit qu’elle marchait à grands pas vers sa ruine. »

M. Syngros se félicite d’avoir résolu les difficultés diplomatiques de l’affaire du Laurium : personne ne le conteste ; mais il eût mieux valu pour le peuple grec qu’elles ne fussent pas résolues par une vente qui, selon M. Cordellas, a étouffé cette industrie dans sa naissance, et que l’éducation industrielle du pays se fît autrement. C’est ainsi que l’histoire impartiale appréciera cette affaire, si l’histoire s’en mêle. Rien d’étonnant que M. Syngros en juge autrement.

Quant au Kaviarokhan, nous sommes heureux d’apprendre de la bouche de M. Syngros qu’il n’a point de relations avec lui. Nous lui en donnons acte bien volontiers.


É. BURNOUF.

Le directeur-gérant, C. BULOZ.