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à Enkuizen et à Kampen, de doubles écluses ouvriront une communication avec la mer libre.

Pour comprendre que l’industrie de l’homme ne recule pas devant un pareil travail, il faut se rappeler que le Zuiderzée est très peu profond, que son lit est partout semé de fonds bas, qu’à côté d’un chenal de 15 à 20 pieds s’étendent de vastes bancs de sable, recouverts d’eau à 3 ou 4 pieds seulement. En outre, par un heureux hasard, l’un de ces bancs de sable s’étend sans interruption d’Enkuizen à Kampen, et il fournira pour la digue une assise solide. Si l’on devait traverser des terrains tourbeux ou vaseux, la difficulté serait doublée; mais on sait par expérience que ces sables compactes portent sans danger les poids les plus lourds; on a pu même y bâtir sans pilotis des ponts de chemin de fer sur la ligne d’Amsterdam. Enfin on doit remarquer encore que ce sable fournira pour les digues des matériaux de remplissage, excellens et tout transportés.

Ainsi nul obstacle sérieux ne s’oppose à la réalisation du projet. Si l’on veut maintenant s’initier aux détails pratiques, on peut prendre pour exemples plusieurs ouvrages exécutés déjà dans des conditions semblables. Les travaux anciens de Westkappel, et ceux tout récens du golfe de l’Y, nous enseigneront les procédés mis en usage par les ingénieurs hollandais.

Auprès du village de Westkappel, les dunes qui protègent l’île de Walchren s’abaissent tout à coup, et le pays serait inondé sans la digue qui ferme le passage. Cette digue se rompit en 1808, et beaucoup d’habitans périrent. Aujourd’hui elle est solidement rétablie et compte parmi les plus belles de la contrée. Haute de 7m,10 au-dessus de A P[1], elle présente à la mer un talus incliné de 1 mètre pour 14 mètres, de sorte que le flot vient s’y briser doucement; sa largeur au sommet est de 12 mètres. Le corps de la construction est ainsi composé : d’abord un fort enrochement à pierres perdues, puis un revêtement de 0m,50 de pierres de Tournai, qui s’élève jusqu’à 0m,60 au-dessus des hautes mers moyennes. La partie supérieure est couverte d’une couche d’argile gazonnée, et la berme porte deux chemins, l’un de fer, pour l’approvisionnement des matériaux de réparation, l’autre de terre pour la circulation des piétons et des voitures. Le tout est protégé par une estacade de onze rangées de pieux, dont les têtes s’élèvent à 1 mètre au-dessus du revêtement.

Quelques modifications ont été apportées à la digue de l’Y, terminée en 1872. Les talus forment, non plus un seul plan très oblique sur le plan horizontal, mais trois plans qui se coupent avec

  1. Point de repère d’Amsterdam.