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sentiment qu’il appartient à une nation victorieuse, qu’il éprouve une sorte de malaise. Nous ne demandons pas mieux que d’assister à ce ménage diplomatique, où l’on voit un ambassadeur en guerre avec son ministre, en correspondance avec sa souveraine et surveillé lui-même dans son ambassade. M. de Bismarck aime la lutte. Quand il ne traduit pas M. d’Arnim en justice, il bataille avec le parlement en faisant arrêter un de ses membres en pleine session, et il force les députés à faire devant lui amende honorable de leurs censures d’un instant. Il triomphe du parlement et de l’ambassadeur ; mais dans ces luttes violentes il faut toujours triompher, et la question est de savoir ce qu’est parfois pour les plus fiers victorieux le lendemain de la victoire.

CH. DE MAZADE.


ESSAIS ET NOTICES.

LA PHILOSOPHIE EN SICILE.
Storia della filosofia in Sicilia da’ tempi antichi al sec. XIX, libri quattro, di Vincenzo di Giovanni, 2 vol. in-12 ; Palermo.

La Sicile a vu naître et fleurir dans les temps anciens et modernes un grand nombre de philosophes, quelques-uns d’une haute valeur et d’une incontestable originalité. Cependant il n’y a pas, à proprement parler, une philosophie sicilienne comme il y a une philosophie grecque, romaine, française, allemande, anglaise et italienne. La philosophie en Sicile a été dans l’antiquité un rameau détaché de la philosophie grecque ; plus tard, elle a subi les diverses influences des civilisations qui se sont succédé dans l’île ; plus tard encore et aujourd’hui même elle n’est rien de plus qu’une branche de la philosophie italienne. A aucune époque, malgré l’éclat des génies individuels qu’elle a produits ou qu’elle s’est assimilés, on ne trouve en Sicile un ensemble et un corps de doctrines autochthones, si j’ose dire, qui puissent constituer une philosophie nationale. Il suit de là que l’Histoire de la philosophie en Sicile, qu’a entrepris d’écrire M. Vincenzo di Giovanni, a quelque peine à revêtir une unité qui vienne d’autre chose que de la communauté du sol où les divers maîtres ont vécu, enseigné ou écrit. Il y a là moins une école qui se développe qu’une suite de noms et une galerie de philosophes. Ce n’est pas la faute de l’auteur, c’est celle de la matière même qu’il traite, et où manque le lien logique qui relie entre elles écoles et doctrines, et en fasse un corps pour ainsi dire organique.

M. di Giovanni, professeur de philosophie au séminaire et au lycée