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II.

Par son glorieux passé, par les services rendus à la cause de la liberté et du progrès, l’université de Leyde méritait, on le voit, que fût entendu l’appel qu’elle adressait, vers la fin de l’année dernière, à toutes les universités de l’ancien et même du Nouveau-Monde; elle les invitait à se faire représenter aux fêtes où elle célébrerait son troisième jubilé séculaire. Pour la France, c’est au ministre de l’instruction publique que fut adressée cette invitation par l’intermédiaire de notre ministre plénipotentiaire à La Haye, M. Target; la France en effet n’a plus d’universités. C’est elle qui jadis les a créées la première, en plein moyen âge; la plus ancienne université qui ait été fondée hors de France, l’université de Prague, en 1348, n’a fait que copier l’université de Paris; elle en a pris les statuts et règlemens. Aujourd’hui nous n’avons plus que l’Université, ce qui est bien différent, c’est-à-dire un vaste ensemble de fonctionnaires groupés hiérarchiquement et chargés de distribuer l’enseignement sous la surveillance de l’état. Ce n’est point ici le lieu d’indiquer comment s’est produit ce changement, d’en signaler les fâcheux effets et les dangers; toujours est-il que le ministre seul, en France, avait qualité pour recevoir l’avis de l’université de Leyde et pour y répondre. Un séjour de bientôt deux ans en Hollande avait mis M. Target à même de garantir aux savans français qui s’y rendraient le meilleur accueil; avec une prévoyance qui s’est trouvée bientôt justifiée, il conseillait d’accepter l’invitation. Au ministère de l’instruction publique, on n’avait point oublié que jadis Henri IV avait conféré aux docteurs de l’université de Leyde le droit de jouir, dans tout son royaume, des mêmes privilèges que s’ils eussent reçu leurs diplômes en France. M. de Cumont désira donc que le haut enseignement français fût représenté à Leyde, et voici comment fut composée la députation française. Les facultés parisiennes des sciences, de médecine, de droit et des lettres furent représentées, les trois premières par leurs doyens, MM. Milne Edwards, Würtz et Colmet Daage, la dernière par M. Jules Girard, le Collège de France par M. Renan, l’École pratique des hautes études par MM. Gaston Paris et Carrière, l’École des langues orientales par M. Th. Schéfer, l’École de pharmacie par M. Alphonse Milne Edwards, l’École des chartes par M. Paul Meyer, l’École normale par M. G. Perrot.

Les autres pays de l’Europe, sauf l’Espagne et l’Italie, n’étaient point restés en arrière. Sans parler des deux autres grandes écoles hollandaises, Utrecht et Groningue, sœurs cadettes de Leyde, trente-trois