le nouvel ouvrage qu’il donne au public : l’Histoire de la philosophie en Angleterre depuis Bacon jusqu’à Locke, ouvrage écrit avec autant d’agrément que de clarté, et dont quelques chapitres avaient d’abord paru ici même. Il était tout préparé pour un tel sujet et par ses études sur l’histoire politique de l’Angleterre et par son livre sur Bacon. Les longs loisirs que lui avait faits l’empire lui ont permis de le composer, et les nouveaux loisirs que lui a procurés le 24 mai lui ont permis de le publier. Nous ne pouvons trouver un meilleur guide pour étudier cette période peu connue et intéressante de l’histoire de la philosophie, et nous essaierons d’en donner quelque idée au lecteur en en empruntant à son historien les principaux traits.
L’ouvrage de M. de Rémusat ne comprend que l’histoire de la philosophie anglaise au XVIIe siècle. Dans cet espace de temps, trois noms s’élèvent au-dessus des autres : Bacon, Hobbes et Locke, auxquels on peut ajouter Newton, quoique la gloire de celui-ci appartienne plutôt à la physique qu’à la philosophie proprement dite. Ces quatre noms sont la part que la philosophie anglaise a fournie à l’histoire de l’esprit humain; mais au-dessous d’eux et dans les intervalles qui les séparent, un grand nombre d’esprits distingués, curieux, quelquefois originaux, se sont fait une place digne d’estime. Nulle part, selon M. de Rémusat, la philosophie n’a produit un plus grand nombre d’esprits « libres et variés. » Alimentée par la controverse religieuse et politique, elle a soulevé en Angleterre beaucoup de problèmes, semé beaucoup d’idées et constamment tenu l’esprit humain en éveil. Ces philosophes de second ou troisième ordre nous sont pour la plupart inconnus, quelques-uns même de nom, et, quant à ceux-là dont le nom est connu, nous n’avions jusqu’ici que l’idée la plus vague de leurs écrits et de leurs idées. L’Angleterre même n’a consacré que des travaux incomplets et isolés à ces philosophes, et M. de Rémusat sera le premier qui nous en aura donné la série régulière et complète. Cette analyse mêlée de biographie et nourrie par les rapprochemens historiques nécessaires sera d’une grande utilité aux philosophes de profession et d’un vif intérêt pour tous.
Dans un livre précédent[1], M. de Résumât avait déjà, nous l’avons dit, consacré une sérieuse étude aux écrits de Bacon ; mais comment parler de la philosophie anglaise sans revenir sur ce grand nom, et sans toucher encore une fois aux controverses qu’il
- ↑ Bacon, sa vie et son temps, 1857.