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LE
CHEMIN DE FER DU HAUT-MADEIRA
ET LE TRAFIC DE L’AMAZONE

Vom Amazonas und Madeira, Skizzen und Bestchreibungen aus dem Tagebuche einer Explorationsreise, nebst der Zugslinie der projectirten Eisenbahn, par M. Franz Keller-Leuzinger, Stuttgart 1874.

On a publié bien des pages savantes ou pittoresques sur le Brésil, et si cette vaste partie australe du Nouveau-Monde a encore des secrets pour nous, ce n’est pas faute d’avoir attiré la curieuse investigation des voyageurs et des hommes d’étude. On nous a dévoilé les splendeurs mystérieuses, du mato-virgem ; on nous a décrit l’immensité majestueuse des campos, le curieux train de vie des fazendas et des haciendas, les miroitemens dorés des sables de l’Eldorado. On nous a aussi fait toucher du doigt les misères sociales et politiques de ce pays tout frais émancipé, qui, après avoir essayé d’asseoir sur l’esclavage une prospérité factice, cherche aujourd’hui dans le travail libre une verdeur nouvelle et plus saine. Tout cela pourtant n’est qu’une vue du Brésil à vol d’oiseau ; cet empire, qui embrasse dans son gigantesque triangle toute une moitié, en partie inexplorée, du continent de l’Amérique du Sud, se compose de régions si diverses et si disparates que l’œil, déçu par la variété des aspects, perd l’ensemble de la perception, et flotte comme au travers d’une vague féerie. La poésie s’accommode volontiers de cet ondoiement d’objets et de couleurs ; mais l’esprit de civilisation, qui prend la science pour point de départ et pour auxiliaire, va tout d’abord au détail, s’avance à pas comptés, examinant les choses par le menu, et n’établit la base de son travail