exceptions : il n’est guère vraisemblable que les côtes de l’Ecosse soient menacées d’un débarquement; les miliciens écossais viennent donc en grand nombre se joindre aux troupes qui défendent le midi de l’Angleterre. Par un autre motif, les Irlandais reçoivent la même destination, et sont remplacés en Irlande par des bataillons venant d’Angleterre. On craint, paraît-il, qu’ils ne soient pas fidèles à leur drapeau dans un moment de crise. Ajoutons enfin que la yeomanry fournira des éclaireurs aux divers corps d’armée, que les volontaires garderont les arsenaux et les forteresses du littoral avec quelques bataillons de réguliers mis en réserve. Voilà en somme l’organisation complète, qui comprendrait un effectif de 350,000 hommes environ tant en réguliers qu’en miliciens. Bien entendu, ceci n’existe encore que sur le papier. Non-seulement l’effectif actuel est beaucoup moindre, — en réalité, il n’est guère que de la moitié, — mais de plus ces huit corps d’armée n’ont encore ni leurs états-majors, ni leurs équipages, ni rien de ce qu’il faut en un mot pour entrer en campagne du jour au lendemain.
Avoir 350,000 hommes sous les armes au jour du danger, tel est le rêve des hommes d’état anglais. Il y a trente ans, Burgoyne se serait tenu content, s’il eût compté qu’il y en aurait dix fois moins. A coup sûr, ces 350,000 hommes, lorsque les magasins de l’armée seront pourvus de tout ce qui leur manque encore, suffiront à la défense du sol britannique. Il ne serait même pas indispensable que tous fussent de bons soldats. Par malheur, les cadres sont à moitié vides. Il y a quatre années déjà que M. Cardwell a obtenu du parlement les réformes qui devaient régénérer la puissance de nos voisins. Qu’en est-il sorti de ces réformes si vivement critiquées par les uns, attendues par les autres? Des polémiques ardentes qui viennent de se produire entre les partisans et les adversaires des institutions militaires de l’empire britannique arrivent à point pour nous révéler la situation réelle de l’armée anglaise.
D’abord le moins contestable est que les hommes font défaut. La statistique officielle donne des résultats navrans sous ce rapport. L’armée régulière a reçu 104,000 enrôlés depuis cinq ans, et qu’a-t-elle perdu? 100,000 hommes en tout, dont 20,000 réformés, 12,000 qui se sont rachetés, 11,000 morts, 18,000 libérés ou retraités après expiration de leur engagement, enfin 18,000 déserteurs et 8,000 congédiés parce que les sergens recruteurs les avaient embauchés, quoique indignes de porter les armes en raison de condamnations antérieures. Quant aux miliciens, on en recrute 30,000 par an environ, et l’on en compte à présent 100,000 inscrits, fort peu dressés aux exercices militaires. La première année, ils passent deux mois au régiment, un mois chacune des, années suivantes; ce n’est pas ainsi que se forment de bons soldats. Leur paie est au