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le sultan Mahmoud ayant consenti à signer le traité de Londres de 1827 avec le protocole du 22 mars 1829. En même temps la conférence de Londres se remet à l’œuvre pour le règlement des détails, et le protocole du 3 février 1830 fixe les conditions définitives du nouvel état. Ces conditions sont meilleures pour la Grèce au point de vue du territoire. La Grèce n’est plus soumise à la suzeraineté de la Porte, elle n’est pas tributaire du sultan, elle est gouvernée par un prince chrétien auquel appartiendront tous les droits de la souveraineté. En échange de ces avantages, on lui retire une partie du territoire qui lui était concédé auparavant. La ligne de ses frontières ira de l’embouchure de l’Aspropotamo à l’embouchure du Sperchius, coupant la Livadie en deux moitiés, dont l’une est assignée aux Grecs, l’autre aux Turcs. Un second protocole en date du même jour disait que les puissances alliées offraient le trône de Grèce au prince Léopold de Saxe-Cobourg-Gotha.

Voilà les choses réglées, quelle va être la conduite du prince Léopold ? C’est ici que commencent ses indécisions, suivies bientôt d’un refus qui a donné lieu aux explications les plus diverses et attiré sur le prince des accusations véhémentes. La vérité (on l’entrevoit aujourd’hui par les notes de Stockmar), c’est que deux ou trois pointes très fines, très aiguës et légèrement empoisonnées lui avaient été piquées au flanc par la main du comte Capodistrias.

Le prince, accepté comme futur roi de Grèce par la Russie et la France, n’avait rencontré de difficultés qu’en Angleterre. George IV subissait alors l’influence de son frère, le duc de Cumberland, celui qui devint roi de Hanovre en 1837, à l’avènement de la reine Victoria ; or le duc de Cumberland faisait l’opposition la plus vive au ministère du duc de Wellington, et cette opposition se retrouvait jusque dans la question des candidatures au trône de Grèce. Le duc de Cumberland soutenait le duc Charles de Mecklembourg, frère de la duchesse de Cumberland, et le faisait soutenir par George IV ; les ministres, favorables d’abord à un prince des Pays-Bas, se rallièrent ensuite à la cause du prince Léopold, et contraignirent le roi de l’agréer, menaçant de donner leur démission, si George IV leur refusait son concours. Il est évident que le ministère du duc de Wellington ne se serait pas compromis de la sorte, s’il n’avait été assuré de l’acceptation du prince. Le prince en effet, dès les premières ouvertures, avait accepté sans conditions ni réserves. Son romantisme, comme dit Stockmar, l’entraînait. L’idée de reconstituer la nation des Hellènes lui apparaissait comme une tâche toute poétique. Ne se souvenait-il pas d’ailleurs que, suivant le comte Capodistrias, les plénipotentiaires avaient accueilli son nom avec froideur ? Il n’en était que plus empressé à recevoir l’offre des