qu’eût donnée à sa mémoire la vivacité nécessaire de la parole publique ! Il suffisait du moindre choc pour animer son esprit, pour en faire jaillir des étincelles. Ces leçons, qu’il aurait du prononcer en présence d’un grand public, il ne les a faites, hélas ! que devant quelques amis presque tous disparus à leur tour. C’est ainsi que le meilleur de lui-même s’est évaporé en causeries brillantes, en discussions pleines de feu, où il tenait hardiment tête à ses plus illustres contemporains : à Cousin, à Villemain, à Patin. Eux seuls auraient pu nous dire ce que valait ce délicat esprit : ils ont vu couler goutte à goutte le liquide précieux renfermé dans le vase ; il ne nous en reste plus que le parfum. C’est assez pour nous faire regretter tout ce que nous avons perdu.
A. MEZIERES.
Beaucoup d’esprits cultivés soupçonnent encore fort peu les services que l’archéologie doit rendre à l’histoire. Un des plus sérieux mérites du livre que M. Perrot vient de former de travaux publiés à différentes époques est de montrer ce que doit être la science des monumens, de la mettre à la place qui lui convient dans l’ensemble des études morales, et par là même d’en faire voir toute la dignité. Si l’archéologie n’était que l’examen de curiosités secondaires, à peine pourrait-on réclamer pour elle l’indulgence qui est due à d’ingénieuses distractions. Il s’en faut qu’il en soit ainsi. Dans la vaste enquête qui fait l’objet de l’histoire, elle veut découvrir ce que nous apprennent du passé les œuvres matérielles que ce passé nous a laissées. Aux représentations figurées, aux peintures, aux bas-reliefs, aux médailles, aux ruines des édifices, elle demande ce que l’historien recherche lui-même quand il consulte des documens écrits : la connaissance de faits nouveaux, l’intelligence des formes diverses de l’esprit selon les peuples et selon les temps.
Dès que nous voulons nous occuper des anciens, les faits nous manquent de tous les côtés. Dans cette pénurie de notions précises, l’archéologie fournit tous les jours un grand nombre de données nouvelles et certaines. — Le chapitre IV de ce volume traite de l’influence que l’art de l’Asie-Mineure a exercée sur l’art grec jusqu’au ive siècle avant notre ère ; il résume une foule d’observations de détail que l’auteur a étudiées dans ses mémoires sur le bas-relief de Nymphi (chapitre II), sur un bronze d’Asie-Mineure (chapitre III), et surtout dans le grand ouvrage où il raconte sa mission de Galatie. La question est de celles qu’il est impossible de traiter, si on se borne aux témoignages des écrivains de l’antiquité. Il