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Sur la pinnace le Searchthrift (l’Heureuse Recherche), chétive barque assez semblable à nos chasse-marée, n’ayant en tout que 8 hommes d’équipage et ne tirant que 4 ou 5 pieds d’eau, le vaillant compagnon de Chancelor, l’ancien maître du Bonaventure, si les prévisions de Sébastien Cabot se réalisaient, ferait un pas de plus dans la grande entreprise. Il n’arriverait peut-être pas, en un seul voyage, au Cathay ; il arriverait tout au moins jusqu’à l’embouchure de l’Oby.

On chercherait vainement le nom et le cours de l’Oby sur la mappemonde de 1544. C’est Giles Holmes, un des compagnons de Killingworth, qui paraît avoir le premier, pendant son séjour à Kholmogory, — le Colmogro des Anglais, — recueilli les notions que Sébastien Cabot a sur le champ songé à utiliser. « On connaît, écrit Holmes, la route de l’embouchure de la Dvina à la Petchora. De la Petchora, voyageant avec des rennes ou avec des cerfs, on compte cinq jours de voyage par terre jusqu’au fleuve Oby ; autant par eau, si l’on est en été. L’Oby est un fleuve rempli de hauts-fonds. L’embouchure a 70 milles russes de large. Sur la côte même habitent les Samoïèdes, race hideuse à voir, mais pleine d’agilité et habile à tirer de l’arc. Les Samoïèdes se nourrissent généralement de poisson ou de chair de rennes ; ils se mangent aussi quelquefois entre eux. Si un marchand étranger vient les visiter, ils n’hésiteront pas, pour le bien recevoir, à tuer un de leurs enfans ; en revanche, si le marchand meurt pendant son séjour parmi eux, ils ne l’enterrent pas, ils le mangent. C’est de leur pays et de contrées plus éloignées encore, mais s’étendant toujours sur le bord de la mer„ que viennent les peaux de zibelines, de renards blancs et noirs, de cerfs et de faons. »

Ces renseignemens étaient bien vagues encore. La cour de Moscou en possédait de beaucoup plus précis. les premières communications. entre la Russie septentrionale et le pays des fourrures remontent à La fin du XIe ou aux premières années du XIIe siècle. À cette époque, la grande et puissante république de Novgorod s’empara de toutes les contrées qui forment aujourd’hui le gouvernement d’Arkangel. Des colons russes vinrent occuper le pays des Tchouda, et ces colons ne tardèrent pas à nouer des relations avec les Vogouls et les Samoïèdes, qui leur apportaient chaque année « du pays des bois noirs, » les uns le produit de leur chasse, les autres le produit de leur pêche. Vers le commencement du XVe siècle, quand Vasili Il régnait à Moscou, Novgorod dut céder au fils de Dimitri Donskoï les droits qu’elle s’était arrogés sur l’antique Biarmie, devenue la Permie et l’Iougorie modernes. En 1499, Jean le Grand, Ivan III, fit franchir à ses troupes les montagnes de l’Iougorie et la vallée de la Petchora. Les Vogouls et les Ostiaks, dont