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Page:Revue des Deux Mondes - 1876 - tome 17.djvu/26

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entre le vieux monde et la vallée du Mississipi. Ce sont eux qui se chargent de vendre en Europe les produits naturels de l’ouest et du sud, et qui approvisionnent ces deux régions des produits manufacturés de l’Angleterre, de la France et de l’Allemagne. Leur clientèle américaine prétend leur vendre au prix de l’or et leur acheter au prix du papier. Ils sont contraints de faire venir de l’or d’Europe pour acquitter les droits de douane, et de racheter ce même or au trésor fédéral pour se libérer envers leurs créanciers européens. Encore si le cours du papier était constant ; mais la dépréciation des assignats, qui n’avait pas dépassé 8 pour 100 jusqu’en 1872, a presque doublé depuis cette époque : elle oscille entre 13 et 17 pour 100. Or les états atlantiques sont obligés de faire de très longs crédits qui varient de huit à onze mois. Les fermiers de l’Indiana et de l’Illinois ne paient qu’après la moisson du blé et du maïs ; les éleveurs des prairies qu’après l’abatage des bœufs et des porcs, les planteurs qu’après la récolte du coton et de la canne. Qui peut prévoir les variations du papier-monnaie entre l’ouverture du crédit et le règlement des comptes ? L’opération la plus sagement combinée peut être rendue désastreuse par une dépréciation, même momentanée, du papier. La population des états atlantiques, à l’exception des extracteurs de houille et de pétrole de la Pensylvanie, est unanime à considérer le cours forcé comme un obstacle insurmontable au réveil des affaires. Elle est convaincue que la stagnation commerciale, qui pèse si lourdement sur l’Union depuis 1872, ne peut prendre fin que par le retrait des assignats et le retour aux paiemens en espèces.

Il convient de rendre cette justice au président Grant qu’il n’a jamais hésité sur cette question. Il s’est rangé dès le premier jour du côté des véritables principes économiques, et n’a pas contribué médiocrement à entraîner le parti républicain dans la même voie : dans aucun de ses messages il n’a manqué de rappeler au congrès l’engagement pris vis-à-vis des créanciers de l’état, et d’en réclamer l’exécution ; c’est sous la pression de son influence que le congrès a voté, en janvier 1875, un bill qui fixe au 1er janvier 1879 la reprise des paiemens en espèces. Les partisans de la circulation métallique ne pouvaient donc espérer de voir leurs intérêts en de meilleures mains.

Il sut également s’emparer, au profit de sa popularité, d’une autre question qui ne fait que de naître. L’instruction du premier degré n’est donnée, aux États-Unis, que dans les écoles publiques, où l’on apprend à lire dans la Bible, et dont les dépenses sont à la charge des états et des villes. Les catholiques, qui forment aujourd’hui le sixième de la population totale des États-Unis, sont fort