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que leurs adversaires ne sont pas les partisans sincères d’une circulation métallique, et que leur arrivée au pouvoir en reculerait le rétablissement.


III

Voici donc les candidats en présence. Les deux drapeaux sont déployés, et la campagne électorale est ouverte. Désormais tous les incidens qui se produiront, tous les actes de l’administration, tous les votes du congrès, ne seront plus envisagés et n’auront plus d’importance qu’au point de vue de l’influence qu’on leur attribuera sur les mouvemens de l’opinion publique et sur l’issue de l’élection présidentielle.

Le cabinet du général Grant, par suite de modifications successives, se trouve complètement transformé. Le président avait eu la singulière pensée de donner la succession du général Belknap à un ancien représentant de l’Ohio, M. Taft, qui occupait les fonctions de juge, et qui, de magistrat, fut improvisé ministre de la guerre. La première tournée d’inspection qu’il fit pour visiter les ouvrages qui défendent l’embouchure de l’Hudson jeta le nouveau ministre de la guerre dans de grandes perplexités et lui fit appréhender que l’amitié du général Grant n’eût trop présumé de ses aptitudes. Sur ces entrefaites, M. Pierrepont, l’avocat-général ou ministre de la justice, à qui le procès de Babcock avait valu mille ennuis et qui refusait tous les jours au président des révocations dont il ne voulait pas partager la responsabilité, sollicita le poste de ministre à Londres, qui était vacant. Le général Grant ne pouvait repousser la demande de M. Pierrepont, qui lui avait rendu de grands services personnels dans l’élection de 1872, et dont la candidature était appuyée par le secrétaire d’état, M. Fish. Les difficultés qui se sont élevées entre l’Angleterre et les États-Unis au sujet de l’application du traité d’extradition et qui doivent conduire forcément à la négociation d’un nouveau traité, rendaient opportun le choix d’un jurisconsulte pour la légation de Londres. M. Taft échangea avec une vive satisfaction le ministère de la guerre contre les fonctions d’avocat-général, et le portefeuille qu’il quittait fut donné à M. Donald Cameron. Le nouveau ministre de la guerre n’a jamais appartenu à l’armée ; il est le fils du doyen des sénateurs, M. Cameron, qui représente la Pensylvanie au sénat depuis près d’un demi-siècle et dont la famille exerce une influence considérable dans cet état important. Ce n’était là que le prélude des changemens qui allaient s’accomplir.

Au lendemain de la convention de Cincinnati, M. Bristow, dont