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régions de notre territoire, une des plus intéressantes est celle qui a pour objet la Corse. Cette île, trop négligée, renferme des richesses minérales, agricoles et forestières à peine exploitées, qui n’attendent, pour devenir productives, que des travaux sérieux d’assainissement et un réseau plus complet de voies de communication[1]. C’est ainsi qu’il existe à Osani, sur la côte occidentale, à quelques centaines de mètres d’une anse accessible aux navires de 500 tonneaux, un dépôt d’anthracite de bonne qualité, qui n’a encore été reconnu que sur une faible étendue. Or cet anthracite donnerait, par le mélange avec les lignites des Bouches-du-Rhône, un excellent combustible pour les navires à vapeur ; bon nombre de ces navires, trouvant en Corse un port charbonnier, pourraient éviter le crochet sur France, la navigation difficile du golfe du Lion, les lenteurs et les frais du port de Marseille ; l’exploitation du gisement d’Osani serait donc lucrative par elle-même et rendrait à la marine des services sérieux. En Angleterre, on voit chaque jour les capitaux s’engager dans des recherches houillères offrant beaucoup moins de chances de succès.

Le rapport de la commission française d’enquête signale aussi la nécessité d’explorations nouvelles. La commission est d’avis que l’état doit encourager les entreprises de ce genre : il pourrait le faire en confiant à ses ingénieurs des mines les études géologiques préalables devant servir de base aux recherches de l’industrie privée. Il conviendrait tout d’abord de dresser une sorte de cadastre souterrain de la France, c’est-à-dire de faire tenir à jour des plans communaux à grande échelle où seraient reportées les données géologiques, les emplacemens des carrières, des mines, des affleuremens, de tous les anciens travaux connus. Ce relevé une fois fait, les ingénieurs procéderaient, partout où il y aurait quelque chance de trouver du charbon, à une étude détaillée du terrain. De tels travaux offriraient enfin à l’activité des ingénieurs des mines un champ qui serait en rapport avec l’esprit qui a présidé à la création de ce corps savant ; mais il faudrait les affranchir des formalités inutiles et fastidieuses qui absorbent aujourd’hui le meilleur de leur temps.

Ce n’est pas tout de chercher de nouveaux gisemens de charbon, il faut encore étudier la question des succédanés. Déjà on cesse de séparer l’anthracite et le lignite de la houille proprement dite dans les statistiques du combustible minéral. En Amérique, l’anthracite est employé partout pour le chauffage domestique et pour le traitement des minerais de fer, et la Savoie suit cet exemple. En

  1. Les admirables ressources de cette île avaient été appréciées par l’Angleterre, qui, pendant sa courte domination de quelques mois, avait affecté aux travaux publics de la Corse une somme de près de 100 millions.