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Page:Revue des Deux Mondes - 1876 - tome 17.djvu/867

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confessent qu’ils font eux-mêmes partie de sa troupe. « Puisque les voleurs sont aussi peu nombreux, dit le khan, une escorte de 80 hommes bien armés suffira. » Il désigne 80 soldats, le capitaine qui les doit commander, et retourne à Khiva, emmenant avec lui les quatre espions.

Pendant deux jours, les soldats voyagent avec la caravane, consommant une bonne portion de ses vivres. Le troisième jour, de très bon matin, ils se lancent en avant pour faire, affirment-ils, une reconnaissance. Au bout de quatre heures, on les voit revenir à toute bride. Eux aussi, ils ont aperçu des traces de chevaux. La caravane ne peut manquer d’être bientôt attaquée. Que leur donnera-t-on pour qu’ils la défendent ? Les marchands font leur offre. Les soldats se récrient : « Pour qui donc les prend-on ? Il leur faut davantage. » Les pourparlers s’engagent ; on ne parvient pas à s’entendre, et les Khiviens retournent vers leur sultan, qui probablement, insinue Jenkinson, était dans le complot. Toute cette affaire est menée avec une astuce qui prouve à quel degré de fausseté et de perfidie peut atteindre la convoitise de ces pillards émérites.

L’escorte partie, que restait-il à faire aux voyageurs ? Leur première pensée est d’invoquer la protection du prophète, puisque celle des sultans leur fait défaut. Les hadjis, — il y avait plus d’un saint dans la troupe, — donnent l’ordre de suspendre la marche de la caravane. Ils se mettent en prières et se préparent à consulter le sort. On prend quelques moutons, on les tue, on leur enlève les omoplates que l’on fait bouillir ; ces omoplates, une fois dépouillées de la chair qui les couvre, on les brûle. Du sang de mouton est mêlé à la cendre. Avec la pâte ainsi obtenue, on trace certains signes, accompagnant le tout de paroles et de cérémonies. Le charme opère, l’avenir se dévoile : « La caravane rencontrera des ennemis et des voleurs, mais ces ennemis et ces voleurs seront déçus dans leurs méchans projets. »

Le 15 décembre au matin, des cavaliers se montrent à l’horizon. Ils approchent ; plus de doute ! ce sont des bandits. Les voyageurs se disposent à la résistance. Ils sont quarante en état de combattre. Chacun à sa façon et selon ses croyances invoque de nouveau la protection du ciel ; tous jurent de vivre ou de mourir ensemble. Les brigands bien armés, au nombre de trente-sept, portant arcs, flèches et sabre, somment les étrangers, qu’ils regardent déjà comme une proie facile, de se rendre à leur chef. À ces menaces, les Tartares ne répondent que par un défi. Là-dessus, décharge générale d’une volée de flèches ; riposte non moins prompte et non moins vigoureuse. Le combat se maintient du matin jusqu’à deux heures de la nuit. Des hommes, des chevaux, des chameaux sont tués et blessés des deux côtés. Jenkinson, les deux Johnson, le Kalmouk