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çaises à Versailles n’ont point assurément l’intérêt général et supérieur des grands débats européens. Elles ont leur gravité cependant, puisqu’au fond, dans ces mille péripéties parlementaires, il s’agit toujours de la sécurité intérieure, de la direction des majorités et du gouvernement, du crédit des institutions, c’est-à-dire de tout ce qui peut faire la force de la France dans les conflits du monde. On aura beau faire, rien ne sera décidé, rien ne suivra une marche régulière, assurée, tant qu’il n’y aura pas une majorité de raison, de bon sens, de courageuse modération, se rencontrant avec le gouvernement lui-même sur un terrain solide et défini. Ce terrain existerait, il est offert par la constitution ; la majorité, quelle que soit la prétention de ceux qui se croient assez habiles pour la diriger, pour la discipliner, n’est qu’une grande incohérence où tout se confond, et l’alliance de cette majorité avec le ministère n’est qu’une fiction prolongée par des concessions quelquefois compromettantes. L’autre jour, à propos d’un débat aussi déplacé que violent, engagé à l’improviste sur le budget des affaires étrangères, M. Gambetta, qui aurait pu prendre pour lui une partie de son observation, s’écriait avec raison : « Voilà où aboutissent les questions mal conduites ! » Eh ! certainement les questions mal conduites aboutissent aux conflits de parole oiseux et irritans, aux votes irréfléchis, aux propositions dangereuses ou inutiles. C’est malheureusement le résumé invariable de nos affaires parlementaires. Sans doute il y a par intervalle des discussions sérieuses, instructives, et tout récemment encore le sénat avait, au sujet de l’administration de l’armée, une de ces discussions où M. le duc d’Audiffret-Pasquier a prononcé un discours substantiel et plein de feu. C’est l’esprit réformateur dans son vrai sens. Eh bien ! nous le demandons aux hommes sincères et réfléchis qui désirent la durée des institutions établies en France : comment la république a-t-elle le plus de chances de s’accréditer ? Est-ce par des discussions comme celle du sénat, par des discours comme celui de M. le duc d’Audiffret-Pasquier ? Est-ce par cette série de motions confuses, de votes tout au moins légers, de réformes incohérentes et contestées qui se succèdent dans la chambre des députés ?

À peine a-t-elle été réunie il y a quelques jours, la chambre des députés, comme si elle voulait rentrer aussitôt dans cette carrière hasardeuse qu’elle s’était ouverte, la chambre a commencé par cette proposition mal venue sur la cessation des poursuites au sujet des faits relatifs à la commune. S’il ne s’agissait que d’une affaire d’humanité, ce serait bien simple, personne ne trouverait rien à dire. M. le président de la république lui-même a écrit, il y a quelque temps, une lettre pour donner toute satisfaction à l’humanité, et le gouvernement n’est point sans doute soupçonné de vouloir s’acharner systématiquement, après cinq ans, à une action judiciaire qui s’éteint d’elle-même par degrés. Donner à une mesure de ce genre le caractère et l’importance d’un