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Page:Revue des Deux Mondes - 1876 - tome 18.djvu/611

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LES
NOUVEAUX ROMANCIERS

MM. GUSTAVE DORE. - ANDRE THEURIET. - ALPHONSE DAUDET.

Au moment d’aborder l’étude de nos nouveaux romanciers, nous ne pouvons nous empêcher de jeter un regard en arrière et de constater, non sans quelque mélancolie, l’affaiblissement progressif de notre littérature d’imagination. Que les hommes distingués dont les noms sont placés en tête de ces pages veuillent bien ne pas prendre cet exorde comme une critique à leur adresse ; il ne s’adresse qu’à la situation générale dont ils relèvent et non à leurs œuvres aimables. Oui sans doute, nous pouvons nous vanter de posséder encore une littérature riche et féconde, si nous rassemblons sous ce nom les produits si variés de l’activité intellectuelle de notre pays, critique, érudition, recherches historiques, exégèse, vulgarisations scientifiques ; mais, si nous réservons ce titre de littérature aux produits exclusifs de l’imagination et de la pensée pure, nous verrons cette richesse se changer en une courte aisance assez voisine d’une médiocrité dorée. L’imagination française tient cependant pour le quart d’heure bon état de maison, mais sans superflu d’aucune sorte, et il arrive trop souvent que, pour combler le déficit des années stériles, il faut compter sur les années à venir, car voici bien longtemps déjà que le capital de célébrité amassé par les nouvelles générations et le stock d’œuvres de valeur fourni par elles ne sont plus assez considérables pour couvrir les saisons de jachère forcée, les inévitables faillites du succès et les déficits