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Page:Revue des Deux Mondes - 1877 - tome 20.djvu/245

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il lui manquait une voix ! tous ces suffrages contestés ont été attribués au candidat républicain, M. Hayes, qui arrive ainsi, au chiffre voulu ; mais à quel prix ce résultat est-il acquis ? M. Hayes atteint bien strictement le chiffre légal, 185 voix, et, bien que la décision des arbitres ne soit pas probablement mise en doute, il est impossible d’oublier que la plupart de ces suffrages, dont profite le candidat républicain, ont été arrachés par la violence dans des états où de prétendus gouvernemens républicains ne se soutiennent que par la force. Cela est si vrai qu’on commence à voir le danger ; et que le cabinet de Washington a menacé de ne plus mettre les armes fédérales au service de ces déplorables gouvernemens. C’est donc dans des conditions passablement précaires et difficiles que M. Hayes va arriver au pouvoir, et si, comme on le dit, il a témoigné l’intention de suivre une politique conciliante, il ne peut certes mieux faire en présence du parti démocrate redevenu depuis quelques années assez puissant pour balancer, à une voix près, l’ascendant du parti républicain. 185 contre 184 ! Encore, si on comptait les suffrages émis au premier degré, la victoire resterait-elle au candidat démocrate. Les États-Unis vont avoir un président élu à une voix de majorité, comme la France a eu sa constitution présente à la majorité d’une voix. C’est peut-être assez pour commencer, ce ne serait pas suffisant si l’habileté et la prudence ne venaient achever une victoire si modeste et si difficilement obtenue.


CE. DE MAZADE.



Histoire de la Floride française, par M. Paul Gaffarel, Paris, Didot.


L’histoire de la géographie est une branche intéressante de la science : suivre le progrès des connaissances humaines concernant, cette planète que nous habitons, depuis les frayeurs légendaires des antiques voyages, depuis les premières audaces des hommes à la triple ceinture d’airain, jusqu’aux dévoûmens éclairés de nos modernes explorateurs dans le centre de l’Afrique, c’est se donner le beau et fortifiant spectacle de ce que peut l’intelligence contre les obstacles de la nature aveugle. Suivre en particulier l’histoire des colonisations modernes, s’attacher plus spécialement encore à celle de la colonisation française, redire ce que nous avons autrefois, dans cette noble carrière, dépensé de mâle énergie, d’intrépide bravoure, d’intelligens efforts, mais aussi de fautes diverses, c’est faire en même temps une étude politique et morale, c’est surtout donner à notre pays un utile conseil et le rappeler vers de grands desseins dont jadis l’ont éloigné des passions et des erreurs qui ne sont plus de notre temps. Dans l’une et l’autre de ces deux voies scientifiques, M. Paul Gaffarel a pris une bonne position en publiant d’abord, il y a peu d’années, une curieuse Étude sur les rapports de l’Amérique et de l’ancien continent avant Christophe Colomb, en donnant ensuite une complète histoire de nos établissemens floridiens pendant le XVIe siècle.