Page:Revue des Deux Mondes - 1877 - tome 20.djvu/477

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

familier relevé par le patriotisme ? . Elles signifient que dans la pensée de M. Thiers, comme dans la pensée de tout le monde, aujourd’hui comme il y a cinq ans, la durée du service se rattache à une multitude d’autres mesures de réorganisation qui n’ont pas reçu une application complète, dont quelques-unes attendent même encore la sanction parlementaire. Des projets, il y en a de toute sorte. Il y a une loi sur l’administration de l’armée que le sénat a votée et que la seconde chambre va maintenant examiner à son tour. Il y a une loi sur l’état-major qui vient à peine d’être présentée. Voilà pour les degrés supérieurs de la hiérarchie. Sur l’état des sous-officiers, il y a aussi trois ou quatre projets plus ou moins heureusement conçus, qui tous se proposent de remédier à un mal profond, à l’affaiblissement des cadres, qui tous ont pour objet de retenir les sous-officiers, de les fixer sous le drapeau en leur assurant quelques avantages matériels, en relevant leur situation, en leur créant une sorte de carrière, et pour cela on a le meilleur modèle dans l’organisation de la maistrance de la marine. La pressante importance de ces dernières mesures, personne ne la méconnaît. Pour tout le monde, c’est la condition invariable. La question des trois ou des cinq ans se lie en réalité à la constitution de cadres permanens et solides. Il est évident que plus l’armée sera fortement encadrée, plus il deviendra facile, par un simple jeu budgétaire, comme le disait M. Thiers, de réduire en fait les années de service. C’est le but auquel on peut tendre ; mais on n’en est pas encore là, et parce qu’il y a des propositions sur les sous-officiers, le problème n’est pas beaucoup plus avancé.

L’essentiel est donc de ne pas tout brouiller, de commencer par le commencement, de réaliser d’abord les conditions sans lesquelles on ne peut pas toucher à la durée du service. Quand on aura réalisé ces conditions, on verra, et en attendant qu’on cesse de faire briller ce mirage trompeur des trois ans aux yeux de nos soldats et des populations faciles à tromper ! Qu’on évite de créer une sorte de trouble avec ces propositions à effet et à sensation dont l’unique résultat ne peut être nécessairement que d’affaiblir l’autorité d’une organisation si récente ! Au fond d’ailleurs, quand on y regarde de près, la question n’est point là où on la place. La loi de 1872, telle qu’elle a été faite, suffit à tout, et il n’y a aucune nécessité de brusquer les règlemens parlementaires pour proposer en toute hâte, sans perdre un jour, des réformes qui ne réformeront rien. La vraie question est, non dans les lois, mais dans la manière dont on applique ces lois, dans l’esprit qui anime à tous les degrés ce grand corps de l’armée, dans la direction imprimée à ce vaste travail de réorganisation si peu avancé. Si les sous-officiers ne restent pas dans leur corps, s’ils se hâtent de partir dès que l’heure de la libération est venue, cela peut tenir sans doute à l’insuffisance de la situation qui leur