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Page:Revue des Deux Mondes - 1877 - tome 20.djvu/614

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forts de mer dans les arsenaux. Elle est chargée aussi de centraliser les dépenses relatives aux torpilles, « et la plus grande partie de ce matériel est à créer, » ajoutait l’amiral. Enfin les travaux hydrauliques ont été négligés, et notamment certains ouvrages indispensables à Toulon, où il n’est plus possible de les ajourner.

Cette situation ne pouvait durer plus longtemps, car, en se prolongeant, elle eût créé dans les services les plus importans de la marine des déficits qui chaque année se seraient augmentés, et qu’il aurait fallu combler tôt ou tard par l’allocation de crédits énormes nécessairement tardifs. Aussi le ministre de la marine annonçait-il dans la discussion l’intention de s’entendre avec son collègue au ministère des finances pour demander à l’assemblée une allocation extraordinaire après le vote du budget normal.

À cette occasion, l’un des orateurs rappela quels éminens services la marine a rendus en France pendant la guerre. Il n’était pas besoin d’invoquer ce souvenir; l’assemblée en a paru pénétrée. De tels services ne sont pas de ceux qu’on oublie; mais il est superflu, en pareille matière, de faire appel aux bons sentimens. L’intérêt du pays est si profondément engagé dans la question, le soin de conserver une marine prospère nous est si impérieusement commandé, — alors qu’on voit les puissances les moins maritimes faire des efforts considérables et des dépenses énormes pour construire ou acquérir des flottes, — que tout le monde admet sans difficulté la nécessité de ne pas laisser déchoir notre établissement naval; mais beaucoup de dépenses moins urgentes et moins utiles accroissent chaque année les charges de l’état et détournent malheureusement des intérêts essentiels de notre pays les esprits trop préoccupés des luttes d’influence et de partis à l’intérieur. Le fonctionnarisme en France est comme une tache d’huile qui s’étend indéfiniment : il absorbe nos ressources les plus précieuses ; le reste ne vient qu’après. Il paraît plus facile de rayer du budget un vaisseau cuirassé que de toucher aux appointemens d’un sous-préfet. Cherchons donc, en dehors de cette arche sainte, un moyen de rendre à la marine une dotation suffisante sans supprimer un seul emploi dans les rangs pressés de l’administration publique.

Alors qu’on alloue 123 millions pour l’armée de mer, elle semble, avons-nous dit, en dépenser 165. Le public, qui n’y regarde pas de si près, est assez disposé à croire que cette dernière somme est très suffisante et doit permettre d’entretenir une flotte considérable. Pourquoi donc encourager cette confusion? Quel rapport si intime y a-t-il entre les établissemens pénitentiaires, par exemple, et la marine, entre la conduite d’un vaisseau et l’administration civile de nos établissemens d’outre-mer? Il existe entre la marine et les colonies un lien d’ailleurs assez indirect : c’est qu’on y va