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un coin de l’Afrique accolé à la France. Le pin d’Alep est un des arbres forestiers importans de la province d’Oran, ainsi que de l’Andalousie et de l’Italie méridionale, de la Grèce et surtout des basses montagnes de la Turquie d’Europe et de la Turquie d’Asie.

C’est le pin maritime ou pinastre qui constitue la forêt des Landes de Gascogne. Cette vaste pignada s’étend aujourd’hui sans interruption de Bordeaux à Bayonne; de là les noms de pin de Bordeaux et de pin des Landes donnés à l’arbre qui la forme, pour ainsi dire, à lui seul. Il est déjà moins frileux que le pin d’Alep, cantonné sous le climat de l’olivier. Le pin maritime est d’ailleurs un arbre de plaine et de montagne ; il ne couvre pas seulement les collines sablonneuses des dunes, il s’élève, en Corse par exemple, jusqu’à 1,000 mètres d’altitude.

A l’inverse du pin d’Alep, le maritime ne se trouve jamais spontané sur des sols calcaires[1]. Il exige pour se développer un terrain siliceux, sable, granit, gneiss ou autres formations dépourvues de chaux. Ainsi les montagnes des Maures, entre Draguignan, Fréjus et Toulon, forment une région siliceuse, couverte de pin maritime et de chêne-liège, tandis que les calcaires qui l’entourent sont occupés par du pin d’Alep et du chêne yeuse. On voit comment les végétaux fixés au sol ont chacun leur place déterminée par les lois naturelles.

Sur les terrains et à l’altitude convenables, le pin maritime se rencontre dans toute la zone littorale de l’Europe méridionale, depuis l’embouchure de la Loire jusqu’à celle du Danube. Il semble qu’il ne puisse vivre éloigné de la mer; les îles de la Méditerranée et l’Algérie en possèdent aussi des forêts; mais les bords de l’Atlantique, en Portugal comme en Gascogne, en sont plus richement dotés que toute autre région. La France a maintenant 700,000 hectares peuplés par cette essence, dont 600,000 environ dans le triangle compris entre la Gironde et l’Adour, le surplus au nord de la Gironde, en Provence, en Corse et en Algérie.

Ce n’est pas un bel arbre que le pin maritime. Ses longues aiguilles, mesurant jusqu’à 2 décimètres, grossières, rares, d’un vert jaune, ne lui donnent qu’un feuillage pauvre et terne; l’écorce est noirâtre et le fût peu élevé; les massifs, clairs et uniformes, ne dénotent pas au simple aspect l’activité de leur végétation et les richesses qu’ils recèlent. Les longues plaies du résinage et les petits pots suspendus à chaque arbre pour en recevoir la gemme viennent achever le tableau de la forêt monotone que traverse le chemin de

  1. MM. Fliche et Grandeau ont établi les faits qui excluent le pin maritime des sols calcaires. Il y absorbe un excès de chaux, qui a pour conséquence une énorme diminution du fer et surtout de la potasse dans les organes axiles; de là résulte un déficit considérable dans la production d’amidon et, par suite, de térébenthine.