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Page:Revue des Deux Mondes - 1877 - tome 21.djvu/480

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s’entendrait probablement plus sur la manière de l’interpréter, sur les conséquences qu’on en peut tirer, et si elle s’entendait encore une fois de façon à rendre le pouvoir par trop difficile à M. Jules Simon, après l’avoir rendu impossible à M. Dufaure, elle irait au-devant de crises nouvelles dont ne profiterait certainement pas le crédit de la république, qu’elle prétend servir. Nous ne savons pas si dans l’état des partis, dans la confusion de la chambre, on peut former une majorité avec d’autres élémens mieux coordonnés, sous une inspiration de prudente modération ; ce serait au moins à tenter, et c’est ici, les hommes distingués d’un de ces groupes nous permettront de le leur dire, c’est ici que le centre gauche manque absolument à son rôle eu prolongeant au-delà de toute mesure une fiction à laquelle il ne croit pas, dont il sent le danger, en faisant sa partie dans cet orchestre assourdissant. Ce qui est certain, c’est que la majorité telle qu’on la représente n’est point de celles qui peuvent donner une force réelle à un gouvernement ; elle est de celles qui embarrassent, qui affaiblissent un pouvoir, qui lui font la vie dure, sans fournir même les moyens de le remplacer. C’est ce que les derniers incidens ont mis une fois de plus en lumière.

Et maintenant, après l’interpellation de la chambre des députés, allons-nous avoir une interpellation dans l’autre chambre? Le sénat va-t-il saisir l’occasion d’interroger le ministère sur la portée qu’il entend donner à l’ordre du jour du 4 mai ou sur sa politique intérieure? L’intention paraît avoir existé, puis des doutes sont venus au moins sur l’opportunité, puis on a examiné encore. Si l’initiative avait dû être prise par l’honnête et intraitable marquis de Franclieu, c’est ce qu’aurait pu demander de mieux le ministère, à qui les opinions légitimistes et ultramontaines de l’interpellateur auraient rendu la réponse facile. Il est certain que par son tempérament, par l’esprit qui l’anime, le sénat ne peut se prêter ni à des agressions immodérées contre l’église ni à des manifestations compromettantes pour l’état. M. le président du conseil n’aurait aucune peine à se remettre au vrai point de son premier discours dans la chambre des députés. Peut-être après tout le sénat aurait-il mieux à faire que de prolonger des discussions irritantes, de répondre à des attaques peu réfléchies par des démonstrations d’autorité, d’opposer ordre du jour à ordre du jour, car enfin, qu’on ne s’y trompe pas, tous ces jeux où l’on se plaît à Versailles, qu’on semble vouloir recommencer avec la session nouvelle, ne sont pas d’un intérêt démesuré pour le pays. Ils ne passionnent ni n’amusent le pays industrieux et calme qui les voit avec une philosophie sceptique, qui ne les comprend pas toujours et qui au fond ne demande que deux choses : la paix avec le travail et un gouvernement à demi sensé, même tout à fait sensé si c’est possible, qui conduise ses affaires sans le compromettre