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partir pour l’Espagne les Cadeaux de noces de M. Gonzalès, le Jongleur Japonais de M. Lonza, la Convalescence de M. de Los Rios, les Favoris de la cour de M. Cazanova, bien que ce dernier ait une touche plus grasse et plus solide que ses confrères, et les Fleurs de parc de M. Brunner-Lacoste, un Français travesti en Castillan.

Maintenant que le critique a, lui aussi, sacrifié à la mode du jour en parlant tout d’abord des tableaux qui intéressent le plus le public, qu’il lui soit permis d’arriver à des œuvres d’un art un peu plus sérieux. La Meta sudans, de M. Emile Lévy, représente une fontaine où les lutteurs Viennent après les jeux du cirque faire leurs ablutions. Les uns se frottent avec le strygile, d’autres se plongent dans les piscines, d’autres essuient l’eau qui les couvre. Au premier plan, trois beaux jeunes gens demi-nus s’avancent pareils à des dieux, — incessu patuere dii. — Celui qui marche au milieu du groupe a une carnation blanche très hardie et très vraie. Au fond, sur une litière portée par des Éthiopiens, passe une jeune femme richement vêtue, une Lesbie ou une Délie, qui remet à une esclave une de ses tablettes. Voici un message d’amour destiné sans doute à l’un de ces beaux lutteurs. La couleur a de la fraîcheur et de l’harmonie, et si les figures du second plan sont d’une exécution trop sommaire, celles du premier plan sont modelées avec fermeté et précision.

L’Audience chez Agrippa, par M. Alma-Tadéma, nous transporte sur le vaste escalier de marbre d’un palais romain. Agrippa en descend les marches, suivi d’une foule de cliens et d’amis. Deux scribes, rasés comme des esclaves, se lèvent de leur table et s’inclinent profondément à la vue du gendre d’Auguste. Au premier plan, trois hommes regardent descendre la cortège en se disant à l’oreille quelque fine raillerie. Seul le manque d’harmonie dans l’exécution dépare ce charmant tableau. On croirait qu’il a été peint par deux mains différentes. Les fonds, l’escalier, les dalles, sont traités avec la précision fatigante habituelle à M. Alma-Tadéma ; ses figures au contraire ont une liberté de touche qu’on ne lui soupçonnait pas. Non moins curieux du passé que M. Alma-Tadéma, M. Henri Motte ne s’arrête pas aux Grecs et aux Romains ; il remonte jusqu’aux civilisations disparues des peuples de l’Asie et de l’Afrique. Il a peint cette année Samson et Dalila dans une gamme un peu terne. La composition est bizarre. C’est en tout cas une page curieuse d’archéologie, moins comme restitution que comme invention, car il existe bien peu de documens précis sur le costume des soldats philistins ! Les deux tableaux de M. Hillemacher, Phidias et Archimède, ne sont pas moins intéressans au point de vue archéologique. Mais il ne suffit pas de draper des personnages antiques