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Page:Revue des Deux Mondes - 1877 - tome 21.djvu/852

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tonalité est terne, la peinture est creuse. L’Atelier de M. Gérôme, par M. Maxime Faivre, est une œuvre de début, sans être pourtant une œuvre de débutant. Traité en figures de demi-grandeur, le cortège d’un baptême bressan arrivant sous le porche d’une église est un sujet ingrat qui n’a pour lui ni le caractère, ni le pittoresque. Mais M. Aimé Perret a peint cette scène avec une extraordinaire intensité de lumière. Avec la Leçon de danse dans un salon de la restauration, M. Emile Adan a cherché l’esprit ; il n’a trouvé que l’esprit glacé d’une comédie de Picard. M. Vannutelli a peint d’une façon plus spirituelle les évêques, les diacres, les chantres et les enfans de chœur de la Procession à Venise. Un sirocco irrévérencieux bouleverse l’ordre de la procession, s’engouffre dans les soutanes, fait bouffer les chasubles et voler les surplis.


VII

Le paysage s’accuse de plus en plus dans la liberté et dans la spontanéité. Le paysage dit de style est bien près de disparaître tout à fait, et ce n’est pas M. Paul Flandrin, un de ses derniers adeptes, qui le fera regretter. M. Achille Benouville, lui aussi, cherche et souvent trouve les belles lignes du paysage classique, mais non point au détriment de l’air, de l’effet et de la vérité de l’impression. Son Lac d’Albano est à tous égards une œuvre très remarquable, empreinte d’un grand caractère. Les berges et les talus des premiers plans, fermement modelés, font s’éloigner dans la perspective ; aérienne la nappe d’eau du lac, la plaine où joue le soleil et le massif bleuâtre de montagnes qui se dresse à l’horizon sous un ciel léger, estompé : de nuages blancs.

M. Daubigny expose un Lever de lune, ce n’est point un de ses meilleurs tableaux. Le feuille des arbres qui se masse durement dans l’ombre crépusculaire n’a pas la légèreté et le frémissement de la nature. D’ailleurs ces paysages sublunaires, privés de l’éclat de la couleur, sont un écueil pour les peintres. M. Bauverie cependant a admirablement rendu un lever de lune au-dessus d’un étang couvert d’ajoncs, qu’environnent deux collines embrumées. Cela a beaucoup de caractère et provoque une vive impression.

Les deux tableaux de M. Lansyer sont d’un sentiment très différent. L’un est une vue prise aux environs de Lille. Une vaste plaine détrempée, sillonnée par le cours capricieux d’une rivière, s’étend sous un ciel gris, lourd de pluie. Deux moulins à vent qui profilent SUIT l’horizon leurs grandes ailes déchiquetées animent seuls ce site désolé. Dans la seconde toile, le peintre nous transporte en avril, au plus épais fourré de la forêt de Fontainebleau. C’est un enchevêtrement de troncs moussus et de folles ramures, de buissons et