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Page:Revue des Deux Mondes - 1877 - tome 22.djvu/345

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les seigneurs de Vizcaye, avant l’incorporation de la province à la couronne de bastille. On m’a fait voir le dépôt des archives, si précieux pour l’histoire du Señorio : les carlistes, pendant leur séjour, n’y avaient fait aucun dégât ; même ils y avaient envoyé, pour le compléter, les journaux, brochures et autres papiers publics émanant de leur administration ; tous ces documens gisaient en tas, pêle-mêle, dans une salle du bas, car ils n’avaient pas eu eux-mêmes le temps de les classer.

De la ville même, il n’y a rien à dire : tout au plus y distingue-t-on une grande place carrée, une vieille église gothique, quelques maisons nobles ornées à l’extérieur de grossières peintures à fresque dans le goût du siècle dernier. Pour y amener plus de richesse et d’animation, on a parlé d’en faire un port de mer ; l’entreprise n’a rien d’impossible, car les bateaux venaient s’amarrer autrefois aux maisons mêmes de la rive, et la marée se fait sentir encore jusqu’à Guernica ; mais il faudrait, beaucoup d’argent. En attendant, les habitans jouissent du sol le plus fertile et du climat le plus doux ; une montagne en pointe, au-dessus de la ville, est tapissée du haut en bas de jardins et de vergers. Du reste toute cette rive droite est encore plus charmante que l’autre ; à mi-chemin s’y dresse, au milieu d’un parc anglais, le joli manoir d’Arteaga, propriété-des Montijo, dont le donjon crénelé se reconnaît de plusieurs lieues à la ronde. Le 17 juillet 1856, dans l’assemblée générale tenue sous l’arbre de Guernica, les représentans du pays décidèrent qu’il y avait lieu de déclarer Vizcayen d’origine le prince impérial des Français, Louis-Napoléon, comme descendant direct par sa mère des deux maisons d’Arteaga et de Montalban. L’empereur accueillit avec beaucoup de bienveillance les députés chargés de lui apporter le décret ; l’impératrice elle-même, flattée de cette attention, voulut faire reconstruire le château d’Arteaga. Un jeune architecte de grand mérite, M. Couvrechef, fut envoyé sur les lieux pour diriger les travaux ; mais, pris de fièvres malignes à la suite d’une excursion sur les bords marécageux de la rivière, il mourut avant d’avoir vu son œuvre entièrement terminée. Un autre Français, M. Ancelet, y mit la dernière main, non sans modifier un peu le plan primitif. On a utilisé, autant que possible, les restes de l’ancienne construction. C’est maintenant une jolie forteresse du XIIIe siècle, rajeunie de toutes les recherches de la renaissance, accommodée aux exigences du confort moderne. Une première enceinte rectangulaire l’environne, flanquée de tours selon l’usage ; le donjon, également carré, est monté de trois étages et terminé par une plate-forme que domine une gentille tourelle ; deux grandes ogives pleines, partant de la base, montent de chaque côté jusqu’à la corniche supérieure couronnée de créneaux, et, dans leur