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Devic et dom Vaissete poursuivent sans fléchir leur longue et laborieuse entreprise. Par l’abondance des documens et des pièces justificatives, surtout par l’étendue et la nouveauté des annotations où tous les résultats acquis de l’érudition et de la critique historique depuis les bons religieux ont été condensés, c’est mieux qu’une édition nouvelle qui est offerte au public, c’est en quelque sorte une seconde histoire du Languedoc qui s’ajoute à la première non-seulement pour en rectifier les erreurs, mais pour en combler les lacunes et pour en compléter la trame générale. On ne saurait donner trop d’éloges à cette partie de l’œuvre où les nouveaux éditeurs, avec une abnégation véritable, ont consenti à déposer les trésors du savoir le plus sérieux au bas de pages où leurs confrères en érudition seront trop souvent seuls à aller les chercher. Quelques-unes de ces notes, et très particulièrement celles de M. Edward Barry, professeur à la Faculté des lettres de Toulouse, sur l’époque gallo-romaine et les révolutions insensibles du paganisme pendant les siècles de l’empire, et celles de M. Edouard Dulaurier, membre de l’Institut, sur les dates et la succession des premières prédications chrétiennes dans le midi de la France, sont de vrais chefs-d’œuvre qui valent des chapitres d’histoire et pourraient se présenter à ce titre devant le public sans excès d’ambition. Le treizième volume, qui vient de paraître, est consacré tout entier à la continuation de l’œuvre restée inachevée des deux savans bénédictins ; c’est donc un travail entièrement nouveau d’une étendue considérable, où l’auteur, M. Ernest Roschach, correspondant du ministère de l’instruction publique pour les travaux historiques, a poussé les annales du Languedoc depuis la mort de Louis XIII, époque où les bénédictins les avaient abandonnées, jusqu’à la convocation des états-généraux, date suprême où toute histoire provinciale a pris fin pour toujours. Dans ces quinze cents pages bien remplies, écrites d’une plume à la fois simple et ferme, l’auteur semble avoir fait effort pour se tenir aussi près que possible du genre de composition dont les bons religieux lui offraient le modèle, c’est-à-dire pour rester modestement dans l’histoire locale, et pour ne se servir de l’histoire générale que comme de lien ; mais les habitudes et les méthodes modernes ont malgré lui trompé sa modestie, et c’est dans le vaste tableau de la vie politique, religieuse et littéraire de la France, pendant les deux derniers siècles que se présentent encadrés les épisodes successifs et les événemens plus anecdotiques de l’existence particulière du Languedoc pendant cette période. Nous nous contenterons pour aujourd’hui d’annoncer ce travail remarquable, qui continue et complète dignement une des publications qui ont fait dans ces dernières années le plus d’honneur à l’érudition provinciale.


Le directeur-gérant, C. BULOZ.