fondations. Restaient celles des particuliers : ici la question était bien plus délicate, et Mirabeau n’arrivait à son but qu’à l’aide de principes, rejetés aujourd’hui par tous les esprits libéraux et que l’on appellerait socialistes, si ces principes n’avaient été ceux de l’ancien régime tout entier, ceux de la royauté et des juristes, à savoir que c’est l’état qui fonde seul la propriété. Qu’est-ce que le droit de propriété ? disait Mirabeau. « C’est ce droit que tous ont donné à un seul de posséder exclusivement une chose à laquelle tous, dans l’état naturel, avaient un droit égal : c’est un bien acquis en vertu des lois. » Il insistait en disant : « C’est la loi seule qui constitue la propriété. Il n’y a que la volonté publique qui puisse opérer la renonciation de tous et donner un titre connu, un garant à la puissance d’un seul. »
En dehors de la loi, il n’y a donc qu’une possession physique, matérielle ; mais il n’y a pas de propriété civile. Or il n’existe pas de loi qui ait constitué le clergé propriétaire. De là deux conséquences : la première, c’est que les fondateurs des donations ont dû prévoir la possibilité d’une destruction du clergé comme corps ; la seconde, que le clergé a dû lui-même prévoir cette possibilité. Ils n’ont donc pu, les uns donner, les autres recevoir, que sous la réserve d’une reprise possible par la nation. Si l’on n’admettait pas ces principes, les décrets sur les privilèges et les droits féodaux seraient infirmés, disait Mirabeau, car c’étaient des propriétés au même titre que les fondations. C’était là, à ce qu’il nous semble, aller beaucoup trop loin et confondre des questions distinctes. En abolissant les droits féodaux, au contraire, les jurisconsultes avaient essayé de faire une distinction nette entre ce qui était propriété et ce qui ne l’était pas ; ils ne s’étaient pas appuyés sur ce principe abstrait et glissant, à savoir que la propriété civile n’existe que par la loi : ils avaient simplement nié que les droits représentatifs de la souveraineté ou de la servitude fassent des propriétés ; Ce n’était donc pas appliquer les mêmes principes que de partir du droit absolu de l’état, qui serait par là autorisé à réviser et par suite à supprimer toute propriété quelle qu’elle fût. Mirabeau se rapprochait de la question en disant que l’état avait le droit de reconnaître le clergé comme corps ou comme ordre, quoiqu’ici encore on puisse dire que ces deux conceptions ne sont pas identiques, car les ordres ont rapport à l’organisation politique, les corps à l’organisation sociale. Enfin, arrivant au vrai nœud du problème, il disait que le clergé, bien loin d’être propriétaire, n’était pas même usufruitier, car il ne pouvait pas consommer les fruits. Il n’était que « dispensateur. »
On remarquera dans la dernière partie de ce discours combien