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pris en venant ici. M. de Sillery, qui était avec lui, a été plus malheureux, ayant été arrêté. Bougy, maréchal de camp dans l’armée de M. le comte d’Harcourt, a enlevé deux des quartiers de M. le prince, où l’on dit qu’il y avait bien 600 chevaux. Il y a près de 300 prisonniers : les régimens qui ont été défaits sont Enghien, Conti, Favas, Duras et La Force.

« Le cardinal n’a pas voulu rendre M. Bitault[1] ; sur quoi le parlement a ordonné que l’on y renverrait une seconde fois, et que l’on signifierait à M. d’Hocquincourt qu’il en demeurerait responsable lui et toute sa postérité. Paris au surplus est autant paisible que jamais. Quand l’ambassadeur vous parlera de moi sur toutes ces affaires ici, témoignez-lui que, par tout ce que vous pouvez juger de mes dépêches, vous me croyez beaucoup d’aigreur contre M. le prince, et faites-lui entendre, sans lui dire et sans qu’il puisse prendre aucun avantage dans le monde, que vous Voyez bien que par cette raison ma conduite me tient en grande faveur à la cour de France et dans le public. Faites voir dans (l’entourage du pape) que je suis tout à fait emporté contre le Mazarin. »

Dans la lettre suivante, en date du 26 janvier, le coadjuteur donnait à l’abbé des nouvelles fort importantes relatives à Condé et à Mazarin : « Nous n’avons point eu de vos nouvelles, lui disait-il, par cet ordinaire, le courrier n’étant pas encore arrivé, quoique nous soyons à la fin de la semaine. J’ai toujours impatience de vous faire savoir des miennes parce que je suis assuré que, dans le chagrin où vous êtes de mes intérêts, elles vous servent de consolation ; je sais qu’ils vous touchent plus que moi-même. Si elles vont bien, elles vous donneront pour le moins autant de joie ; si elles vont mal, je vous conjure de ne vous en inquiéter pas plus que moi qui ne suis pas, comme vous savez, fort touché de la fortune, et à qui je vous (assure) que les événemens sont fort indifférens. Je crois, selon les apparences, que celui de mon affaire ne sera pas mauvais, puisque je ne vois pas qu’il y ait de révocation par la raison que je vous ai dit, au moins les nouvelles que vous allez voir dans cette lettre vous marqueront suffisamment que ce n’est pas par la considération de M. le prince qu’elle peut être traversée.

« Je crois vous avoir déjà mandé l’enlèvement de deux quartiers de l’armée de M. le prince par Bougy, maréchal de camp dans l’armée de M. le comte d’Harcourt. Depuis lequel temps M. le prince, s’étant voulu retirer et ayant mis dans Barbésieux et dans Pons quelques-unes de ses troupes pour menacer M. le comte d’Harcourt, il a toujours continué dans le premier dessein de sa retraite,

  1. L’un des deux conseillers au parlement qui avaient été envoyés par cette compagnie pour s’opposer à la marche du cardinal Mazarin, et que les troupes de celui-ci avaient arrêtés.