le tyran, et vous aurez raison. Je vous remercie de la petite carte : on m’a dit qu’on trouverait à Strasbourg celle de toute l’Allemagne, pareille à celle que vous m’avez envoyée. le voudrais fort en avoir trois exemplaires[1]. » D’ailleurs il convient peut-être de rappeler ici que l’alliance autrichienne fut accueillie par un applaudissement presque universel. Ce ne fut pas seulement le roi qui se félicita de l’union intime avec Vienne comme de « son ouvrage[2]. » Duclos nous raconte que « ce fut une espèce d’ivresse. Chacun s’imagina que l’union des deux premières puissances tiendrait toute l’Europe en respect. On proposa même dans l’Académie de donner pour sujet du prix de poésie le traité entre les deux cours. » Voltaire écrivit au comte d’Argental : « On dit que Marie-Thérèse est actuellement l’idole de Paris et que toute la jeunesse veut s’aller battre pour elle en Bohême[3]. » On chantait à Paris, en apprenant la nouvelle de l’invasion de la Saxe et de la victoire de Frédéric à Lowositz :
- D’un ton doux et flatteur, mon cousin,
- Dire aux gens que l’on pille
- Qu’on est leur protecteur, mon cousin,
- La tournure est gentille.
- Voilà d’un Mandrin l’allure, mon cousin,
- Voilà d’un Mandrin l’allure.
Un an plus tard encore, — avant Rosbach, il est vrai, — Starhemberg, revenant de souper à Versailles, « où l’on a bu de bien bon cœur à la santé de sa majesté l’impératrice, » s’exprimait en ces termes : « Il me parait d’être parmi des compatriotes, et la joie que tout le monde marque est si sincère que je ne puis croire que je suis en pays étranger. » C’est qu’en effet la popularité vraiment européenne de Frédéric ne date que du fort même de cette guerre de sept ans. Quand Voltaire était parti pour Berlin, on vendait une caricature dans les rues de Paris en criant : « Voilà Voltaire ! ce fameux Prussien ! Le voyez-vous avec son bonnet de peau d’ours pour n’avoir pas froid ? A six sols, le fameux Prussien[4] ! » Mme de Pompadour put donc croire et se flatter, au bruit des chansons et du cri populaire, qu’en négociant le traité de Versailles, elle avait fait acte de haute politique.
La cour de Vienne cependant ne se contenta pas longtemps du secours de 24,000 hommes stipulé par le premier traité. Dès le mois d’octobre 1756, Kaunitz, ambitieux de couronner son ouvrage, écrivait à la