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dans la supposition de misérables intrigues dont les chefs éduens doivent porter la principale responsabilité. Leur inaction, attestée par le vainqueur, autorise tous les soupçons.

Les Romains, en creusant leur double enceinte autour d’Alise, avaient dû laisser en dehors de leurs travaux un mont que l’on croit reconnaître dans le mont Réa, à quelque distance du mont Auxois. Cette hauteur eût masqué pour le reste du camp les retranchemens élevés en arrière, et les Romains avaient préféré étendre leurs lignes en contre-bas sur le terrain en pente descendant vers l’Oze. Vergasillaune, instruit de cette disposition qui lui permettait d’attaquer, du haut des crêtes, fit défiler pendant la nuit son corps d’armée, que César estime, en l’exagérant selon toute probabilité, à 60,000 hommes, tourna le mont Réa, puis, à midi, heure convenue, il lança brusquement ses troupes sur le sommet de ce mont qu’il occupa sans coup férir. À ce mouvement hardi, qui semblait annoncer l’action générale attendue avec tant d’impatience, Vercingétorix répondit par une sortie en masse. Le combat s’engagea sur les deux points avec un acharnement sans égal. Les Gaulois des deux côtés sentaient que la journée serait décisive. Leurs cris, se confondant à travers l’espace, troublaient les Romains qui avaient toujours lieu de craindre d’être attaqués en arrière par une des colonnes victorieuses. Les Gaulois du Réa, arrivés au pied du rempart, avaient comblé de sacs de terre les chausse-trapes et le fossé ; après des efforts titaniques, ils parvinrent enfin sur l’épaulement. De son côté, Vercingétorix se détourne brusquement, du point qu’il avait d’abord menacé et se jette sur une autre partie des retranchemens romains qu’il enlève dans une charge furieuse. Les lignes ennemies étaient donc entamées en deux endroits. Toute l’armée romaine était engagée. César d’un côté, Labienus de l’autre, avaient dû dégarnir les redoutes et les autres parties de l’enceinte pour s’opposer aux progrès des deux chefs gaulois. En même temps, César, qui payait de sa personne, avait fait sortir sa cavalerie pour tourner les Gaulois de Réa et les prendre en flanc. C’est alors surtout qu’on se demande avec indignation ce que devenait donc le reste de l’armée de secours. Une troisième attaqué sur un des points dégarnis, en dégageant Vergasillaune et Vercingétorix, leur eût permis d’envahir le camp avec leurs forces unies avant que la cavalerie romaine eût achevé son mouvement tournant. Ne pouvait-on du moins tâcher de paralyser ce mouvement en lui opposant quelques troupes fraîches ? Rien ne fut fait. En vain Vergasillaune, attaqué de flanc, en avant et en arrière, se battit en désespéré, attendant toujours une diversion qui ne venait pas. Enveloppés et sabrés, voyant tomber leurs principaux officiers, — entre autres Sédul, chef des Limousins, et soixante-quatorze porte-étendards, — ses soldats,