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Saint-Nazaire que l’on doit se préoccuper ; ce dont il s’agit surtout, c’est d’amener à Nantes le plus de fret possible pour venir en aide à un grand port dont la situation sera bientôt chancelante, si l’on n’y prend garde. Déjà des ports comme Dunkerque, sur la mer du Nord, Cette, sur le golfe de Lyon, font beaucoup plus d’affaires que Nantes, même augmentée de Saint-Nazaire. C’est que Dunkerque et Cette sont des têtes de canaux. Nantes doit s’étudier à jouir enfin du même avantage, et ce qu’elle doit demander sans relâche, ce que sa chambre de commerce, ce que tous les Nantais doivent au besoin exiger, c’est une canalisation complète et définitive de tout le bassin de la Loire, et une communication assurée de ce bassin avec ceux du Rhône, de la Seine et du Rhin. Il faut également que le réseau de toutes les voies ferrées qui aboutissent ou doivent aboutir à Nantes soit enfin achevé, complété, et que les compagnies, pour le bien du commerce, pour le bien général, réduisent au minimum et leurs tarifs et leurs exigences. Là est principalement le salut pour Nantes, pour tous nos ports ; il est aussi dans un peu plus d’activité, un peu plus d’initiative individuelle de la part des Nantais. Sans doute il y a à Nantes plus d’un bon exemple à citer, plus d’un grand armateur, plus d’un grand industriel ; mais, dans l’ensemble, la place nous a paru un peu endormie, un peu paresseuse, d’humeur sédentaire, même rétrograde, et nous voudrions qu’il fût possible, dans son intérêt et dans celui du pays, de la tirer enfin de cet état de torpeur. Pourquoi, depuis quelques années, les affaires semblent-elles y rester stationnaires et sur quelques points y décroître ?

Tous nos ports se plaignent, et une partie de leurs plaintes sont fondées ; mais aussi ils doivent bien reconnaître qu’une part de responsabilité leur incombe dans les difficultés de la situation actuelle. Il faut faire une évolution vers les créations industrielles ; il faut s’habituer de plus en plus à transformer, à manufacturer la matière première que l’on reçoit, et non plus seulement à la distribuer aux usines lointaines, comme on faisait jadis. Le travail industriel moderne a pris d’autres allures que celui du passé. Que Nantes profite en cela de l’exemple que lui donne Marseille. Ce qui a sauvé ce port, ce sont les usines de tout genre qu’il a su établir. Il en a dans la ville elle-même, dans sa banlieue, dans le département, dans les département voisins, et tout cela fonctionne pour ainsi dire sous les yeux et dans tous les cas avec les capitaux de l’armateur et du négociant marseillais. N’avons-nous pas vu près de Nantes, à Basse-Indre, une forge très florissante qui date de 1825, à Couëron, une verrerie, une fonderie de plomb ? Ces exemples ne doivent pas être isolés. Il ne faut pas surtout, comme à la fonderie