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d’un péril obscur et oppressif, en se retrouvant soudainement dans des conditions où toutes les difficultés ne sont point sans doute épuisées, mais où les institutions viennent de montrer leur efficacité et leur force. Il a fallu depuis six mois tous les déchaînemens des partis surexcités ou déçus pour rendre un instant si difficile, presque impossible, une solution qui a justement l’avantage de tout sauvegarder et de ne rien compromettre. Telle qu’elle est en effet, cette solution, elle est tout simplement la légalité régulièrement raffermie. Elle ne touche nullement à la constitution, elle la consacre de nouveau, au contraire. M. le maréchal de Mac-Mahon a pu avoir à sacrifier quelques préférences ou quelques goûts personnels ; il reste dans l’intégrité de sa position, dans son irresponsabilité, avec ses prérogatives et ses droits, qui ne sont point atteints. Président de la république, il n’a eu qu’à se replacer dans la république, avec son rôle de pouvoir respecté et paisible. Qu’avaient donc à lui offrir d’un autre côté ces habiles conseillers de résistance, qui l’ont entouré jusqu’au bout et dont la constitution était le moindre souci ? Le premier acte eût été de percevoir arbitrairement les impôts, d’organiser à la surface de la nation un vaste réseau d’illégalités, d’engager par une dissolution nouvelle, si on avait pu l’arracher au sénat, une lutte corps à corps contre le pays, avec l’aide de l’état de siège et des moyens militaires de circonstance. C’est là ce qu’on appela une solution conservatrice, — et ce que M. le président de la république a fait en se rendant à un vote du pays, en se conformant aux plus simples règles du régime parlementaire, c’est ce que d’étranges conservateurs appellent une capitulation devant l’ennemi, devant la révolution ! On se faisait de l’autorité du chef de l’état et de l’honneur d’un maréchal de France une telle idée qu’on ne craignait pas de lui proposer comme un objet digne de son ambition une série d’attentats, un bouleversement de la France dont aurait profité au bout du compte qui aurait pu, le plus audacieux ! M. le président de la république peut voir maintenant ce qu’on attendait de lui, ce qu’il pouvait attendre à son tour de ces singuliers fonctionnaires dont quelques-uns, après avoir abusé de son nom, se croient permis de l’outrager, de lui parler de manquement à la foi jurée, parce qu’il n’a pas voulu être le violateur de toutes les lois. Si M. le maréchal de Mac-Mahon a éprouvé jusqu’au dernier moment des anxiétés d’esprit, s’il a eu quelques scrupules, il peut vraiment se consoler de se séparer d’une si brillante compagnie, d’avoir préféré s’en tenir à un dénoûment régulier qui rend la paix au pays par le respect des institutions, qui met fin correctement, loyalement, à ce grand trouble stérile du 16 mai.

Le mérite de cette longue crise heureusement dénouée aujourd’hui, c’est d’avoir été une épreuve utile et de rester une lumière pour tout le monde, pour tous les partis, pour les vainqueurs comme pour les