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à M. Victor Hugo, qui n’a dit encore ni oui, ni non. Tout est pour le mieux ! C’est l’histoire d’aujourd’hui : sera-ce l’histoire de demain, quand le ministère va se trouver devant les chambres, en présence de cette majorité républicaine assez nuancée, avec laquelle il faudra s’entendre en la dirigeant, en la contenant au besoin, en lui faisant sentir que l’opposition n’est pas le gouvernement ? Voilà la question nouvelle ! Elle s’élèvera dans quelques jours, à l’ouverture de la session qui commencera le 8 janvier ; elle ne laisse pas d’être sérieuse. Si la majorité républicaine suit des conseils sages, si elle sait se souvenir que, dans ce passé si récent, elle n’a pas été elle-même exempte de fautes, que par des agitations stériles elle a donné tout au moins des prétextes aux coups qui l’ont frappée, si elle sait enfin se pénétrer des circonstances nouvelles, elle tâchera d’éviter les discussions irritantes et les discussions inutiles. Et d’abord on ne laissera pas au ministère cette apparence de provisoire en lui mesurant le budget douzièmes par douzièmes ; le budget complet, c’est le signe des situations régulières. Ce qui n’est pas moins nécessaire, c’est de ne plus garder dans une chambre cette image d’un temps de crise, ce comité des dix-huit, qui a été formé pour le combat et qui n’est plus qu’un pouvoir irrégulier, sans mandat, sans responsabilité, disputant ou mesurant la majorité au gouvernement. On se hâtera enfin d’écarter toutes ces controverses périlleuses sur l’armée, sur la discipline militaire, qui doivent être closes par la note suffisamment explicite que vient de publier M. le ministre de la guerre. Oui, on évitera cela et bien d’autres choses encore pour laisser à l’exposition universelle qui s’approche la première place au milieu d’une situation pacifiée.

Pour nous, pour la France, elle finit donc mieux qu’elle n’a vécu, cette année étrange qui vient de se traîner dans les troubles et les vertiges. Avant de s’évanouir pour jamais, elle nous a rendu la paix, le calme des esprits, en laissant aux conseils favorables le temps de reprendre leur empire. Qu’en est-il du continent, de tous ces états qui forment la grande et puissante agglomération européenne ? À part les difficultés et les malaises intérieurs de chaque jour qui ne sont épargnés à aucun pays, ni aux grands, ni aux petits, l’année qui s’en va lègue à tous pour l’année qui commence cette éternelle crise orientale, cette guerre aux péripéties sanglantes, aux proportions inconnues d’où dépend encore la sécurité universelle.

À pareille époque, il y a déjà un an, si l’on s’en souvient, une conférence européenne était réunie à Constantinople pour mettre un terme à la guerre de Serbie, surtout pour prévenir un choc déjà imminent entre la Russie et la Turquie, en un mot pour sauvegarder la paix en retenant cette terrible question d’Orient sous la juridiction souveraine de sa diplomatie. La conférence de Constantinople n’a rien empêché, pas plus qu’une autre conférence réunie peu après à Londres. L’impa-