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débandade. Il revint à Leydenburg comme un fugitif, semant partout le bruit que les Basoutos s’avançaient en forces supérieures. Le Volksraad se réunit encore pour aviser aux circonstances. Mais que faire ! Il n’y avait plus d’armée, puisque les volontaires, Européens ou alliés indigènes, s’étaient dispersés ; pas d’argent, car l’emprunt négocié en Hollande était déjà dissipé. Tant bien que mal, on enrégimenta des mercenaires, allemands ou anglais, que les terrains aurifères avaient attirés dans cette région. Dès ce moment aussi, il se produisit une vive agitation en faveur de l’annexion anglaise. C’est que la population s’était modifiée depuis quelque temps. Les nouveaux venus n’avaient point, comme les boers de l’ancien temps, l’amour de l’indépendance, la haine du gouvernement britannique. C’étaient des aventuriers de toutes nations, désireux de vivre en paix avec les natifs. Peut-être s’étonnera-t-on que les natifs eux-mêmes aient montré tant de vigueur dans la lutte. Eux aussi étaient changés ; surtout ils étaient mieux armés. Jadia il était interdit de leur vendre des armes à feu. Depuis que les mines d’or et de diamans s’exploitaient, les jeunes gens des tribus de toute l’Afrique australe y allaient travailler tour à tour ; à l’instigation de leurs chefs, ils n’en revenaient jamais sans rapporter un fusil en bon état qu’on leur vendait dans ces villes improvisées où la surveillance n’était pas possible. Ainsi, dans les deux républiques hollandaises de l’intérieur, de même que vingt ou trente ans plus tôt en Australie ou en Californie, la découverte des richesses minérales avait été le signal d’une transformation complète. Le Transvaal ne pouvait plus vivre dans ces conditions. Avant de dire comment il a fini, il convient de raconter l’histoire de la colonie voisine de Natal à laquelle il sera désormais associé.

On n’a pas oublié les chefs zoulous, Chaka et Dingaan, qui possédaient la terre de Natal à l’époque où les premiers émigrans boers franchirent la chaîne du Drakenberg. Battus par les Européens, les Zoulous se retirèrent au nord ; mécontens de la suprématie que s’arrogeait le gouverneur du Cap, les boers à leur tour se retirèrent à l’ouest. Quelques-uns seulement des plus paisibles restèrent dans la province, heureux d’y trouver d’excellens pâturages et d’obtenir des concessions de terres dont les autorités anglaises ne leur mesuraient pas chichement l’étendue : chaque ferme avait en effet une superficie de 6 à 8,000 arpens. Certaines tribus natives, à qui l’on accorda aussi la permission d’y séjourner, furent cantonnées dans des réserves que l’on choisit, comme il était juste, parmi les terrains les moins fertiles.

Cependant Natal était toujours fort peu peuplé d’Européens. Là, de même que dans le reste de l’Afrique australe, les colons